Je crois comprendre le sens de ta question. Il s'agit de la gestion des intervalles au sein des unités. Prenons, pour faire simple, une centurie. Tout récemment, François Gilbert a publié un article dans le dernier "Prétorien Magasine" parlant jutement des intervalles. Je te le conseille si tu peux le lire. Toutefois, bien qu'il se base sur Végèce et sur des exemples tirés du corpus littéraire datant de la République et du Haut-Empire, je ne suis pas complétement d'accord sur plusieurs points qu'il évoque.
En lisant les sources primaires, on voit que l'armée romaine insiste, et revient sans cesse sur l'importace de garder le rang et la ligne:
-Chaque rang d'avant en arrière est bel et bien séparé de 7 pieds, moins un pieds que constitue la place qu'occupe le soldat dans le rang (total: 1,80m) Cette séparation est initialement prévue pour laisser l'espace nécessaire à l'emploi des armes de jets (javelots, plumbata ect...) Elle est importante en marche, ou quand l'unité n'est pas au contact de l'ennemi pour pouvoir "pilonner" à l'envie l'adversaire sans prendre le risque d'éborgner un camarade (le soldat dispose en effet de 6 pieds devant soi et 6 pieds derrière soi que deux soldat avant/arrière peuvent se partager...) Le javelot ayant une taille d'à peine plus de 6 pieds, et l'Hasta un maximum de 8 pieds, on peut même prendre son élan (l'élan est limité au pieds gauche en avant et à l'impultion du corps chez Végèce [Livre I,25]) sans blesser personne dans sa ligne...) Au contact au combat au "corps à corps" cette distance peut être brisée partiellement.
-La distance latérale est plus stricte. Chaque soldat dans sa ligne occupe un espace de trois pieds (total: un peu plus de 90cm) et non pas une distance de 3 pieds à sa droite et à sa gauche, ce qui double l'espace partagé. C'est là le points de divergeance avec l'article de François Gilbert qui donne une séparation de presque un mêtre entre chaque ailier, ce qui, même si en effet les hommes peuvent combattre librement, ne peut constituer un "ordre sérré", disons raisonnable. Pour en être convaincu il faut relier les chapitres XIII et XIV du livre III en opérant le calcul des distances prônés par Végèce et en gardant à l'esprit ces trois pieds de distances ("Singuli autem armati in directum ternos pedes inter se occupare consueuerunt" [XIII] et "singuli pugnatores ternos occupant pedes" [XIV]) Le résultat de ce calcul fait bien que le soldat dispose uniquement d'un espace dans l ligne d'à peine plus de 90cm:. Les trois pieds de départ.
La conséquence pour le fantassin de l'époque tardive fait que les boucliers archéologiquemet attestés, qui font un diamêtre de 90cm (et ce n'est certainement pas un hasard...) se retrouvent bord à bord, nous avons bien une ligne en ordre sérré (attention, les boucliers ne se chevauchent pas!!!) L'Historien Philip Rance affirme de même que le soldat occupait cet espace restreint de trois pieds qui permet ainsi de présenter une ligne parfaitement régulière (comment faire autrement sinon?)
-Arrien dans ces "tactica" et son "Contra alanos" nous montre que les romains pouvaient resserrer ou désserrer les rangs (donc les colonnes...) en fonction de la situation et en empruntant les mécanismes de la phalange. Très sérrés sur son front contre une cavalerie lourde, chacun s'arc-boutant pour faire barrage à une éventuelle percée de la cavalerie ou pour amortir un choc violent... C'est le Synapismos, et l'hypothèse de l'Historien Wheeler. Le même procédé est employé par les romains pour la formation en "Caput Porci" ou le petit cuneus, cette fois en employant l'Othysmos, le mécanisme de poussée vers l'avant que concentre la pointe de la formation. Mais cette dynamique rudimentaire est plus complexe.
-Wheeler, vous le verrez dans la suite de ma traduction, même si cela est déjà amorcé dans ce que vous pouvez en lire, croit en une flexibilité très souple de l'unité face au danger et en une complémentarité des armes. L'Historien anglais avec lequel je ne suis pas complétemet d'accord fait le postulat que l'enseignement d'Arrien est le prototype de ce que sera l'armée romaine tardive dans ses formations. L'auteur toujours sur la base d'Arrien (mais pas seulement, il fait des recoupements...) va très loin dans sa réflexion ce qui n'est pas inintéressant du tout:
Selon lui:
1) Deux types d'armes différentes peuvent équiper la même centurie (armes d'Hast et armes de jet...)
2) La centurie poséderait un rapport de 1/2 quelque soit le nombre de rangs total (Wheeler va s'y arrêter au moins aussi longtemps que pour l'identification du Kontos...) Autrement dit: Une première moitiée de la centurie (ex: 4 lignes...) sont en synapismos ou en othysmos face à l'ennemi, donc les soldats arrières en support et en contact avec ceux de devant pendant le corps à corps ou en poussée si besoin est. Tandis que la seconde moitiée (les 4 rangs qui suivent...) conserve ses écarts de 6 pieds avant/arrière pour lancer ses armes de jets. Encore une fois, si besoin, le soldat ayant lancé ses traits peut venir à son tour supporter les rangs avant et les soutenir. Nous retombons là dans une formation proche de celle du "fulcum" de Maurice.
Une mécanique qui renforce le rôle de commandement des Decani (mais ça c'est mon hypothèse personnelle...)
C'est, résumé, l'idée de Wheeler; Ce qui est intéressant et propre au tardif c'est que cette mécanique est déclinable à l'envie (En effet, l'armée du haut-empire ne semble pas fonctionner sur ce système...) Dans la même centurie, quatre ligne de lanceurs de plumbatae soutenus par quatre lignes de lanceurs de javelots, ou quatre lignes de hastaires soutenus par quatre lignes de lanceurs de javelots ect... (je gache le suspens mais pour wheeler, le Kontos d'Arrien est au final l'Hasta des romains...) La centurie combat pour moitiée au contact alors que la seconde prend le temps de lancer ses traits avant de rejoindre (sans se précipiter ou pousser comme des sourds...) la dite première moitiée ce qui permet dans le même temps un feu constant issue de l'Acia des fantassins lourds.
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