Bonjour,
Je "re" lisais le livre de Philippe Richardot sur "la fin de l'armée Romaine", lorsque je suis tombé sur un passage qui je dois l'avouer, me laisse avec plein de questions...
En effet, suite au rappel des troupes de Gaule par Stilico en 406/407 ( ), la Gaule s'est organisée plus ou moins face aux raids germaniques et alains du fameux 31 décembre et le passage du Rhin gelé. Des milices se sont crées et ont posées, avant l'arrivée du futur "Constantin III", une résistance plus ou moins efficace face aux "envahisseurs", même si beaucoup de villes furent ravagées.
Une question cependant m'obsède, ces troupes ou milices, de qui ou de quoi étaient-elles composées ?
De soldats du Comitatus à la retraite, de Limitanei, lètes, ou bien alors de citadins voire de paysans "Gallo-Romains"?
vos impressions....

On peut avoir une vague idée de ces milices en lisant Synesius de Cyrène (début du Ve siècle) ou Sidoine Appolinaire (milieu-fin Ve siècle). Il semblerait en effet que sous Honorius l'interdiction de porter des armes pour les civils soit tombée. Chez Ammien, vous aurez la mention de polices provinciales plus que de "milices" à proprement parler.

On en a pas mal de références en Britannia sur les milices d'autodéfense suite au retrait des forces romaines, peut-être autorisées par Honorius en 410 (à moins que la fameuse lettre soit adressée au Bruttium en Italie), voir ici chez saint Gildas dans son De Excidio Britanniae :

(p32), XVIII, 1 "Les Romains avertirent alors notre patrie de ce qu'ils ne pouvaient plus être si souvent dérangés pour des expéditions aussi pénibles. Les enseignes romaines, une armée d'une telle importance et d'une telle qualité ne pouvaient plus s'épuiser, sur terre et sur mer, pour des brigands errants et inaptes à la guerre. Ils font la leçon aux Bretons : qu'ils s'habituent aux armes et qu'ils combattent virilement pour défendre avec toute leur énergie leur terre, leurs biens, leurs femmes et leurs infants, et ce qui est plus important encore, leurs liberté et leur vie."
"Mais qu'elles soient équipées de boucliers (peltis), d'épées (ensibus) et de javelots (hastis) et décidées à tuer."
2 "Ils leurs donnent des conseils d'énergie et leurs laissent des modèles d'armes à fabriquer (exempla instituendorum armorum reliqunnt)."

(p32-33)XIX, 1 "des bandes de Scots et de Pictes horribles traversent les vallées océanes et débarquent en raids de leurs coracles."
"Quelque peu différents par les moeurs, ils communient dans le même désir de répandre le sang ; ils couvrent davantage leurs visages de cheveux et de barbe que de vêtement les parties honteuses de leurs corps et ce qui les entoure."
"ils prennent aux milices indigènes toute la région située à l'extrême nord du pays, jusqu'au mur."

(p33)XIX, 2 "Une force armée est bien cantonnée au sommet des tours. Mais elle est lente à combattre, incapable de fuir, rendue inefficace par la panique qui fait palpiter les coeurs et tourmentée de jour comme de nuit par ce sièges qui les hébétait. Car, pendant ce temps, les flèches recourbées des hommes nus ne leur laissaient pas de répit (interea non cessant uncinata nudorum tela) et arrachaient des murailles nos malheureux compatriotes (cives) qui s'écrasaient sur le sol."

viewtopic.php?f=39&t=126

Pour Stuart Laycock ces milices tribales bretonnes existeraient depuis le IVe siècle au moins et auraient formé une bonne partie des troupes des usurpateurs Maxime et Constantin III.
Voir ma fiche de lecture de son premier ouvrage et celle de Robert Vermaat par ici :
viewtopic.php?f=39&t=353


Les succès des bagaudes en Gaule au Ve siècle pourraient aussi s'expliquer par l'existence de véritables milices armées se retournant contre le gouvernement romain plutôt que par un simple phénomène de banditisme.

Ce type de milice était toléré à l'époque d'Honorius, quelque fois c'était même des vétérans qui les avaient créées. Certaines unités romaines sont même devenus des milices, notamment les vétérans sarmates ( c'est seulement le nom de ce corps armé, car elles sont constituées en grande majorité de Bretons ) en Bretagne.
A partir de 410, avec le retrait de certaines ou de toutes les troupes pour défendre l'Italie, les milices sont dès lors une force permettant de défendre les villes et les territoires désertés par les légions, ce qui fut le cas au Pays de Galles.
Les milices seront finalement autorisées sous Valentinien III, dans les années 440, pour permettre aux citoyens de défendre leur ville. Le cas de Eccidius contre les Wisigoths semblerait le prouver.
Merci !

Très intéressant tout ça en Bretagne...
J'imagine qu'en Gaule on doit avoir le même cas de figure, il est réellement possible d'envisager alors que ces milices étaient "approvisionnées" en hommes par des lètes, gentils, fédérés et gallo-romains et placées sous le commandements d'anciens officiers ou soldats.
J'ai cru comprendre que les Saliens avait participés activement à la défense de l'axe Nord Est/Ouest avec plus ou moins de succès, mais c'est la seule base que je peux vous donner actuellement (je crois par Kazanski ou Brulet, suis pas sur, je regarderai au passage). J'ai beau relire Ammien Marcelin et la Vie de St Martin de Tours, en fait rien de plus sur le phénomène gaulois mais peut être l'essentiel est dit non ???

Phénomène étonnant que ces milices quand même...

En Gaule c'est le cas des fils d'Avitus, d'Eccidius que j'ai nommé ( mais j'aurais dû préciser que c'était en Auvergne ), mais le comte Paul et Syagrius devaient également se servir de milices d'autodéfense. Mais il y a le fait également qu'il étaient de riches propriétaires terriens et donc pouvaient se payer des mercenaires Germains.
Les Francs et les Burgondes peuvent avoir servis dans des milices d'autodéfense contre d'autres Barbares. Les Alains à partir de 406, qui sont de grands cavaliers, ont pu servir également dans ces milices.
Merci !