Nous sommes actuellement le 29 Mar 2024, 07:01

Heures au format UTC + 1 heure [ Heure d’été ]




Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 2 messages ] 
Auteur Message
 Sujet du message: Remarques sur l'économie romaine et byzantine. Nouveau.
Nouveau messagePublié: 07 Sep 2008, 23:35 
Hors-ligne
Avatar de l’utilisateur

Inscrit le: 04 Sep 2008, 19:30
Messages: 2747
Localisation: Laigneville
Quelques remarques sur l'économie romaines et byzantine.
Esquisse comparative


De John Haldon.

Traduction collective.

Donner un résumé, même très sommaire, de la nature et de la structure de l'économie byzantine médiévale exigerait beaucoup plus de temps qu'il ne m'est imparti pour cet exposé. Par conséquent, j'essaierai de décrire les éléments qui me paraissent les plus importants à garder en mémoire dans une perspective comparative, c'est à dire les caractéristiques les plus révélatrices de l'économie byzantine prise comme un ensemble et la manière dont elles sont lices les unes aux autres. Bien sur une "économie" ne peut être vraiment comprise isolée de la société à laquelle elle correspond: d'une certaine manière une économie est par définition également une société. Aussi me concentrerai je sur ce que j'appelle les éléments clés: les villes dans leurs relations avec l'Etat et leurs arrières-pays ruraux; la nature même des rapports de production agricole; I'action de l'Etat et de ses rouages sur l'économie et le rô1e des élites ou des catégories sociales dominantes.

Jones décrit l'empire romain comme une “agglomération de cités”. Mais à la fin du VIe siècle, on admet de façon générale que les cités du Bas-Empire étaient déjà très différentes de celles que les sources et le dossier archéologique des IVe et Ve siècles nous font connaître. Et puisque la question du rô1e des cités dans le monde de Byzance pose, à mon avis, toute une série de questions sur la nature de l'économie, je commencerai par traiter ce problème.

Sans entrer dans une discussion sociologique trop détaillée, on peut définir les cités de trois manières élémentaires. Tout d'abord, dans le sens de centre urbain ou "ville", comme un lieu où les producteurs venant des différentes localités alentours peuvent se rencontrer sur une base d'échange de biens et de services; où les pouvoirs politiques locaux peuvent être rassemblés; où se trouvent des centres religieux.

Deuxièmement les cités peuvent s'étendre au-delà de leurs limites proprement urbaines, reflétant une concentration originelle de tribus ou de groupes de personnes d'une même lignée, réunis pour se défendre; elles servent alors de centre d'activité sociale et économique, et dans ce cas, en développant des institutions politiques et sociales, acquièrent de ce fait un statut particulier qui les distingue alors des autres établissements ruraux. Beaucoup de poleis ou civitates méditerranéennes trouvent leurs origines dans ce processus.

Troisièmement, les cités situées dans des lieux stratégiques génèrent des fonctions administratives et attirent des institutions en tant que centres d'activités militaires et fiscales.

Ces trois modes de perception sont peut-être sommaires, mai ils servent d'ébauche à une typologie des centres urbains dans le monde romain et hellénique. Bien sur ces catégories ne sont pas exclusives les unes des autres - la plupart des villes représentent un mélange de ces trois éléments, si l'on exclut quelques fondations secondaires établies par des souverains particuliers et qui riches de leur région. Les résultats des fouilles dans les Balkans, I'Asie mineure et la Syrie le suggèrent aussi. Il est possible qu'aient circulé dans les milieux urbains autant de richesses qu'auparavant, à la différence près que la ville, comme institution, n'y ait plus eu qu'un accès très limité. Les villes avaient vu leurs terres et le revenu de ces terres leur être pris. De plus l'église à partir du IVe siècle était devienne un concurrent en matière de consommation des ressources. Et quelle que soit la quantité d'argent que les habitants pouvaient donner aux villes, individuellement ou collectivement, elle pouvait difficilement compenser cette perte 4. De telles contributions constituaient effectivement désormais leur principale source de revenu autonome. Les informations archéologiques suggèrent un rétrécissement de l'aire occupée dans beaucoup de cités et même une rétraction croissante de l'activité d'échange au niveau local. Mais, encore une fois, ceci ne signifie pas un changement de leur rôle en tant que centres d'échange locaux.

Mais revenons au point de vue de l'Etat. Le premier point à souligner est que l'Etat romain, au cours des IIIe, IVe et Ve siècles, avait assez délibérément suivi une politique de "rationalisation" du réseau des villes. Beaucoup de centres urbains furent privés du statut et des privilèges de la cité, d'autres qui étaient importantes pour lui comme structures administratives et fiscales reçurent le statut de cités pour la première fois. Cela n'avait rien à voir avec les intérêt économiques, et reflète plutôt le désir des empereurs d'établir un réseau de centres adaptés aux exigences du système fiscal. Un nombre considérable de cités éliminées de ce processus n'étaient guère plus que des villages représentant les communautés autonomes ou semi-autonomes des états pré-romains rattachés à l'empire. En dotant certaines communautés du statut de cité, et plus précisément en leur attribuant des fonctions administratives et fiscales, assorties de la responsabilité en ce domaine, I'Etat leur assuré une continuité de vie tout en accroissant localement leur importance, quelle qu'ait pu être au départ leur situation économique. Des lors que les élites de telles communautés s'avéraient désormais incapables, pour les raisons déjà évoques, de remplir convenablement ce rue pour 1'Etat et que celui-ci commençait à superviser directement les affaires fiscales des cités, en employant plus souvent les curiales comme assesseurs et collecteurs que comme garants, il était logique que le maintien de ces cités devint un sujet d'indifférence pour le gouvernement central, au moins en termes fonctionnels. Bien sur le processus était souvent tempéré par l'importance idéologique des cités et de la culture citadine dans le monde romain, qui se traduisait par une participation impériale à l'entretien et à la reconstruction des bâtiments urbains. De plus des cités plus particulièrement associés au christianisme - par le biais du culte d'un saint local par exemple - augmentaient leurs chances de prospérer sans avoir encore de caractère économique majeur.

Un second point concerne le rôle de Constantinople. L'établissement d'une nouvelle capitale impériale sur le site de l'ancienne ville de Byzantine a eu des conséquences considérables sur les modes d'échange et de redistribution des biens dans la méditerranée orientale et dans le bassin égéen, phénomène largement confirmé par la répartition des céramiques. Le développement des sigillées phocéennes, au détriment de marchandises reconnues mais extrêmement localisées, est directement lié au grand marché de Constantinople dans la seconde moitié du IVe siècle et les marchés de la capitale ont continué à déterminer la production de céramique en Egée pendant toute la période médiévale. De plus l'institution d'une cour et d'un sénat, avec toutes ses implications sociales, économiques et administratives a eu, dans la même région, un effet comparable sur ce que j'appellerai le modèle d'investissement socio-culturel. Ce qui signifie qu'au début du VIIe siècle, à quelques exceptions près, I'accroissements de prestige et de statut social lié à l'investissement de richesses personnelles s'est concentré de plus en plus à Constantinople car l'opération constituait le meilleur moyen de s'assurer une place privilèges dans le système impérial. Bien sur, il y a des exceptions, celle d'Alexandrie par exemple. Néanmoins les diverses modalités d'administration et d'appui impérial doivent être considérées comme un autre élément ayant un impact sur la manière dont les élites investissaient leurs richesses et, partant, sur le volume de l'investissement social dan les villes de provinces.

Les céramiques en particulier revêtent de ce point de vue une grande importance car elles montrent très clairement la position exceptionnelle occupée par Constantinople et sa proéminence comme centre clé de consommation et de redistribution des biens de toutes sortes. Mais le témoignage de l'archéologie urbaine dans les provinces reflète également ces processus - un échec quasi universel dans le maintien des bâtiments publics et du système de distribution des eaux et, malgré le nombre considérable d'églises qui sont construites pendant le VIIe siècle, un appauvrissement général de la vie publique des cités.

On a récemment démontré que, alors que les formes de la vie publique avaient changé, les cités ont continué à prospérer jusqu'au début du VIIe siècle en tant que centres des sociétés provinciales locales. Ce sont les formes d'investissement socio-culturel qui ont changé. Ainsi les églises plutôt que les bâtiments publics semblent avoir attiré les investissements. Alors que certaines grandes cités déclinaient, on possède de nombreuses preuves de la continuité d'une vie urbaine en province.

Le fait est sans doute vrai pour beaucoup de centres urbains. Mais il importe d'insister sur les résultats qualitatifs de tels changements. Les témoignages archéologiques, bien qu'imparfaits, suggèrent clairement de profonds changements dans l'organisation interne et les priorités sociales des communautés urbaines pendant la période considérée. La ville provinciale à la fin du VIe siècle ne possède plus un nombre impressionnant d'établissements publics en bon état. Les rues sont plus étroites et leur implantation laisse supposer une complète absence de planification générale de la cité. les murs, églises et autres bâtiments sont réparés ou construits, au moins en partie, qu'avec des matériaux de remploi. Les quartiers habités sont considérablement réduits par rapport au passé. Bien sur il y a des exceptions, mais seule la tendance générale nous intéresse ici. Et bien que quelques textes des VIe et VIIe siècles donnent une description animée de la vie urbaine, il ne faut pas oublier qu'il est impossible de comparer d'une façon objective un texte, aussi enthousiaste et détaillé que soit son contenu, aux descriptions semblables d'autres textes. La description de la vie urbaine à Antioche au IVe siècle par Libanius et le tableau de la vie à Anastasiopolis en Galatie au VIIe siècle, dans la vie de Théodore de Sykéon font tous deux le portrait de communautés urbaines florissantes. Mais il ne faut pas pour autant supposer que les cités de la fin du VIe siècle étaient aussi florissantes qu'Antioche deux cents ans plus tôt. Il faut prendre en compte le type de source et surtout l'idée que se font les autours de ce qu'est une société urbaine florissante.

De plus la relation fiscale qui existe entre la cité et l'état est fondamentale; elle est significative de l'évolution des cités au cours de la période. Alors que l'Etat adopte une position de plus en plus interventionniste à propos de l'estimation et de la perception des recettes, les villes voient leurs fonctions diminuer en tant que centres de vie politique et sociale. Bien sur l'idéologie de la culture urbaine s'exprime différemment, mais la reprise d'activités urbaines renouvelées sous l'empereur Justinien me semble, pour ma part, une tentative idéologique désespérée pour consolider la culture urbaine traditionnelle. Et les effets de l'interventionnisme fiscal de l'Etat, associé à l'existence d'une bureaucratie impériale et palatine centralisée dans laquelle la société s'investit de plus en plus, semble avoir eu un effet réel sur l'attitude des élites envers leur propre cité et envers Constantinople. Je crois qu'il existe un parallélisme entre le déclin du pouvoir des villes - ce qui signifie des curiales dans le domaine de la fiscalité d'Etat et la diminution de l'importance économique et socio-culturelle des cités au prof~t des élites sociales et politiques dominantes de l'Etat. Ceci n'implique pas nécessairement que les élites des cités ne s'y soient pas quelque peu investies, mais signifie que la position structurelle des cités vis à vis de l'Etat est engagée dans un processus de transformation radicale.

Il faut ajouter encore un point très important en ce qui concerne la forme et la fonction des centres urbains (ou plut6t urbanisés), en tant que noyaux d'administration impériale et militaire dans les provinces pendant la période du cinquième au septième siècles. Car on peut remarquer - comme j'ai déjà fait mention dans les Balkans du troisième au cinquième siècles un long processus de fortification et d'encastellation des cités, dans un contexte d'insécurité (menace constante des attaques barbares etc.), un processus qui s'est vu évoluer avec la collaboration et l'assistance de l'état romain, et qui reflète les besoins de l'état du point de vue de son administration fiscale et le système de défense.

La possibilité existe, que la transformation de beaucoup de villes anatoliennes en kastra pendant la septième siècle, qu'on a déjà remarqué, particulièrement avec le commencement des attaques arabes des années 640 et apres, reflète aussi une intervention de la part de l'état, une réorganisation délibérée et consciente (mais probablement aussi graduelle et différenciée par région) des centres de défense et des refuges pour la population des provinces.

Pour résumer brièvement ces différents points, on assiste, à la fin du VIe siècle, aux effets combinés d'un manque d'autosuffisance de la part des villes -due à leur relative pauvreté par rapport à la période précédant la confiscation de leurs biens; de l'attraction très forte de Constantinople sur l'élite sociale du bassin oriental de la Méditerranée et, du point de vue institutionnel, de l'intervention croissante de l'Etat dans l'administration fiscale de la cité, des effets en somme de l'existence d'un pouvoir centralisé relativement fort. Une série de facteurs qui demeurent très controversés, mais doivent avoir eu quelques conséquences même s'ils n'étaient pas essentiels, ont aussi joué tour à tour: en particulier une baisse démographique générale, exacerbée par une peste endémique.

Les effets de la guerre doivent être ensuite pris en considération, ceux de la guerre du VIIe siècle. Les invasions persanes tout d'abord, puis le dévastations des raids et des invasions arabes - qui se sont avérés trop lourds pour de nombreuses villes fragiles de province, d'économie extrêmement locale. Parasites par définition de leurs arrières-pays, la grande majorité des cités se sont resserrées autour d'un cocon fortifié défendable, qui ne pouvait subvenir qu'aux besoins d'une population très réduite; il faut tenir compte des effets perturbations des guerres qui ont rendu l'acheminement des denrées alimentaires et autres biens vers les cités à la fois dangereux et improductif et réduit par conséquent drastiquement le nombre de lieux où pouvaient exister cités et centres urbains.

A cet égard, il est utile d'examiner le cas d'une zone qui, bien qu'appartenant à l'Empire dans l'Antiquité tardive, n'a pas souffert, comme beaucoup d'autres régions d'Asie, de la crise économique et des conséquences d'une guerre continue. Je veux parler de la Syrie dont les villes ont connu une évolution semblable à celle qui vient d'être décrite (et d'où proviennent en effet de nombreux témoignages sur le VIe siècle). Dans les années 630, la plupart des centres urbains se sont rendus sans grande résistance aux Arabes, ce qui leur a épargné le destin des cités anatoliennes. Mais bien qu'il soit clair que beaucoup de cités aient continué à y prospérer, on observe tout de même dans un changement fondamental. Elles deviennent souvent, il est vrai, des centres de l'administration musulmane; et les fonctionnaires de justice, de même que les perception d'imp6t ont également tendance à y résider. Mais elles ne retrouvent jamais leur identité collective. Tout comme celles qui demeurent dans la partie orientale de l'empire, les cités de Syrie ont perdu leur indépendance fiscale et leur personnalité juridique. On peut donc conclure que la différence entre les centres urbains de l'état byzantin et ceux du Califat est en grande partie une question de degré. Elles ont perdu ce qui faisaient leur identité commune, mais continuent, dans toutes ces régions, à retenir leur population et attirer nombre de nouveaux habitants. Par conséquent le sort connu par les villes du bas empire, subissant un processus de transformation de leurs fonctions, est confirmé par l'évolution des villes situées hors de l'empire après la deuxième moitié du VIIe siècle. J'insiste volontairement sur l'emploi du terme "transformation" plut6t que celui de déclin qui, possédant plusieurs sens, peut induire en erreur.

Il existe aussi par conséquent un débat sur la "ruralisation" croissante de la société byzantine. Il en existe peu de prcoves, mais pendant quelques temps dans la seconde moitié du VIIe siècle l'Etat semble avoir transféré sa vigilance en matière fiscale sur les communautés villageoises qui deviennent finalement le principal critère d'estimation. Une telle observation semble traduire en partie la dévastation, I'abandon, la diminution ou le déplacement de beaucoup de cités d'Asie mineure et résulter des invasions et des incursions, surtout à partir des années 640, mais aussi durant les guerres persanes. Là où il y a permanence de l'occupation, le phénomène répond à des nécessités telles que la défense des biens, en rapport ou aux besoins militaires, administratifs, ecclésiastiques, etc.~~. Mais ce transfert d'attention, des cités aux villages, reflète en partie la dynamique interne des rapports de l'Etat et des villes, la diminution de l'importance sociale et économique que revetent les secondes aux yeux du premier qui ne serait pas une conséquence des invasions arabes, mais aurait été seulement exarcerbée par celles-ci.

Quelle que soit la manière d'interpréter l'histoire de la cité, I'importance majeure du village dans les considérations fiscales à partir de la fin du VIIe siècle est claire. Leur désignation d'origine traduit cette importance, le mot "village" en grec ancien ou moderne significant jusque vers le milieu du VIe siècle "unité f~scale", bien d'un propriétaire occupé par des locataires par opposition au mot courant hellénique et romain pour "village" - kowè. A partir de la fin du VIò siècle et de plus en plus au VIIe siècle et au-delà, cho^rzon est le mot usuel pour le village - désignant le village en lui-meme, mais aussi les terres qui lui appartiennent - qui est aussi une unité fiscalete Les biens de chaque région f~scale - tour à tour centrés sur le village et les terres appartenant aux habitants - étaient estimés par des fonctionnaires désignés par l'autorité centrale, agissant à partir d'une base administrative locale (une forteresse par esemple ou des bureaux militaires de province). La communauté fiscale était représentue par ses propres chefs - normalement les villageois les plus riches, qui ponvaient etre aussi les propriétaires de plein droit - qui devaient collocter l'imput et l'apporter aux fonctionnaires de l'Etat. Les modalités pratiques ont varié avec le tempstó. Mais il est de fait que la ville dispara~t complètement comme intermédiaire entre la province et la capitale, et on peut raisonnablement parler d'un remplacement de "I'agglomération des villes" par une "mosafque d'économies de villages".

Tous les éléments de la législation impériale du début du VIIIe au XIe siècle, connus par des références fortuites fournies par les hagiographies puis, après le Xè siècle, par les chartes monastiques et les actes d'exemption prouvent l'importance fondamentale du village comme centre d'intéret fiscal,7. Au meme moment des éléments littéraires et archéologiques montrent la position préominente prise par Constantinople, une position qui, comme on l'a vu, était déjà marquce à la fm du VIò siècle, mais qui devient beaucoup plus nette avec la perte des provinces de l'Est. Aucune des cités ou centres urbains d'Anatolie ou des Balkans ne ponvait rivaliser avec la capitale impériale qui était désormais, jusqu'aux Xe-XIe siècles, le scul centre important de l'administration et d'une activité de production et d'échanges en plein essor. Au VIIe siècle, meme les céramiques de cuisine ordinaires de Constantinople sont exportoes, bien qu'en quantités réduites, aussi loin qu'à Rome ou Carthage. Une esception est constituce par l'afflux de marchandises délicates en provenance de Carthage et de son arrière-pays, au milieu et à la fin du VIIe siècle, phénomène qui n'a pas encore fait l'objet d'une étude scientifique, mais qui reflète probablement les liens aussi bien politiques et culturels que militaires qui unissent alors Constantinople à l'exarcat de Carthage, pendant et après la controverse monothélite.

Un autre élément peut expliquer l'aspect de plus en plus rural pris par la société byzantine et l'Etat pendant cette période: il s'agit de l'armoe. Il ne faut pas oublier que l'état byzantin a maintenu une armoe considérable et utilisé dans ce but, d'une manière ou d'une autre, une grande partie de ses revenus. De 640 à 660, les informations dont on dipose suggèrent fortement que 1'Etat a beancoup manqué d'argent. Mais il conserve son armoe. La solution était de disperser les soldats dans les provinces où ils pouvaient etre directement entretenus, au lieu de leur verser des soldes qu'ils ponvaient alors échanger sur le marché ou de les affecter en garnison dans les cités en en lcur procurant des fournitures (un système onéreux qui impliquait un investissement organisationnel considérable). Bien sur quelques cités ont été pourvues d'une garnison et de petites soldes ont continué à etre versées. Mais dans les faits l'Etat est revenu à un système d'entretien de ses armoes comparable, bien qu'à une échelle réduite, à celui du IVe et du début du Ve siècles. Celui-ci constituait une réponse efficace à la situation de guerres et de difficultés fiscales que devait affronter l'Etat. Cela revenait, une fois encore, à rehausser l'importance fscale et économique du village ou de la régon rurale au détriment de la ville.

Les centres urbains locaux ne sont guère cités que comme lieux où l'armoe ou l'église peuvent trouver un abri et une protection. L'archéologie, les céramiques surtout, montrent que les échanges demourent strictement locaux de la seconde moitié du VIIe aux Xe-XIe siècles. Des échanges interrégionaux sporadiques ont subsisté et le commerce des biens de luse s'est maintenu au gré des circonstances; mais tous se sont vus réduits du fait des circonstances à partir du milieu du VIIe siècle. La disparition définitive de l'annone constantinopolitaine fournie par l'Egypte doit avoir produit le meme effet sur les régions cetières de la mer Egée. Les cités au sens traditionnel du bas empire ne jonent qu'un très petit de dans la vie politique, économique et sociale de Byzance de la seconde moitié du VIIe au IXe siècle.

A la différence des cités romaines du VIe siècle et avant, les villes byzantines étaient de simples villages fortifiés. Au cours du VIIe siècle, les événements dont on a parlé contribuent à supprimer tous les rapports qu'elles ponvaient entretenir avec l'Etat autrement que comme bases militaires ou administratives. Les batiments municipaux n'existaient pas dans la plupart des cas. L'Etat et l'église construisent, pour lcur usage, greniers, murs et dép6ts d'armes, mais les cités sont privées de ressources propres, de terres, de revenus, de personnalité joridique et civique. Les riches propriétaires locaux pouvaient investir dans des batiments, et l'ont probablement fait, bien qu'il n'en existe ancune prcuve avant le XIe siècle. Mais la plupart l'ont fait - quel qu'ait été lcur capital culturel et social - à Constantinople et dans le système impérial qui se concentra on l'a vu, après la perte des provines orientales, presqu'exclusivement dans la capitale.

Mais lorsque, comme résultat de la stabilisation militaire et politique en Asie mineure au début du IXe siècle, quelques cités récupérèrent lcur fortune, elles se développèrent surtout si elle jouait un r61e évident de marché pour lcur région. Cette observation illustre très bien le fait que la crise économique et sociale et la période d'instabilité dues aux guerres contre les Arabes pendant les VIIe et VIIIe siècles ont détruit justement les centres urbains dont la fonction dominante était politique et fiscale, et non celles qui possédaient en plu un r61e économique réelzo. Ceci ressort du fait qu'au moins quinze centres urbains de Cappadoce et beaucoup plus de quarante-cinq en Galatie et Lycaonia (y compris Sykéon, demoure de saint Théodore au début du VIIC siècle) sont abandonnés au cours des VIIe-VIIIò siècles;~. Thèbes, en Grèce, est un bon esemple de centre urbuin à avoir connu un net redressement pendant la dernière période, c'est à dire à partir du milieu du XIe siècle, devenant le centre d'une florissante production de la soie: les marchands locaux et les propriétaires y ont lcurs maisons et y attirent les artisans, les petits propriétaires paysans ayant des biens à vendre et les personnes dépourvues de terre à la recherche d'un emploi. La plus grande partie des villes n'ont pas joui de telles conditions avant le milieu du IXe siècle.

Et on devrait également dire que la renaissance urbaine, si on peut l'appeler ainsi, est également en relation avec l'évolution de l'aristocratie byzantine, en mesure d'investir ses ressources dans l'agriculture et l'industrie, dans un contexte de concurrence pour l'obtention de la faveur impériale et la préominence économique.

Ainsi à la fm du Xe siècle et surtout aux XIe-XIIe siècles, le rue économique des cités les plus importantes s'accroit. Le fait est partiellement du à l'amélioration des conditions en matière de commerce et d'échanges entre les villes et le pays au sein de l'empire. Il traduit également les demandes en produits alimentaires de Constantinople aux cités et aux villes de l'arrière-pays En meme temps les villes commencent à jouer un r61e central en politique. Alors que, de la f n du VIIe au milieu du XIe siècle, une grande partie des révoltes militaires se déroulent dans les campagnes, autour des généraux de thèmes (provinces militaires), à partir du XIe siècle, I'opposition au gonvernement central nait presque toujours dans les villes, dont la population apparait dans les documents comme un ensemble d'habitants partageant des intérets spécifiques. A la différence de ce qui se passe dans une partie de l'Europe occidentale, I'identité collective ne dépasse pas ce stade car les villes byzantines se tronvent également sous la domination d'importantes familles nobles détentrices à la fois d'une très grande richesse foncière - et coci est très important dans le contexte byzantin - et de fonctions ou de titres impériaux. C'est une conséquence de l'organisation militaire de l'empire à partir du milieu du Xe siècle, lorsque de nombrcuses villes deviennent siège d'officiers locaux et de lcurs soldats, qui traduit à son tour l'aptitude de l'Etat, après les crises des VIIò et VIIIe siècles, à fournir ses soldats uniquement en argent liquide, en se fiant pour le reste aux marchés locaux. Enfin, cela montre la domination grandissante de la campagne par ces magnats qui ont absorbé peu à peu un nombre considérable de propriétés foncières appartenant à de petits paysans qui étaient autrefois libres dans lcurs domaines. Il s'ensuit une "déruralisation" de la vie économique et sociale telle que l'avaient connu les VIIe et VIIIe siècles.

Si l'on s'arrete un instant pour considérer l'évolution du VIe au XIIe siècle dans son ensemble, il me semble clair que les villes ou les cités de cette période n'ont pas de rapport structurel ou institutionnel avec lcurs ancetres. Le scul point commun est constitué par la position géographique. La ville byzantine du Xe siècle et des siècles suivants a développé les conditions des VIIIe-IXe siècles et l'examen de sa forme et de sa fonction dans la structure économique de la société fait apparaitre comme déterminants les factours qui viennent d'etre énumérés. Ils peuvent se résumer comme suit:

1) l'indépendance économique et par conséquent politico-culturelle des cités;
2) l'habileté et/ou le désir de la conche économique dominante de chaque cité de participer au dispositif fiscal de l'Etat;
3) la nature de l'Etat (fort, centralisé ou non) et sa conception de l'utilisation des villes comme centres fiscaux et administratifs;
4) la stabilité economique de chaque région (absence ou non de guerres, etc.) et les rapports entre la demande urbaine en produits et la capacité de la pogulation rurale (ou sa bonne volonté) à les fournir;
5) le comportement des élites sociales locales et régionales (et la mesure dans laquelle elles concentrent lcurs efforts pour conserver ou améliorer lcur situation sociale, économique et politique à Constantinople ou dans lcurs provinces);
6) les rapports entre l'Etat et la classe dominante, notamment en qui concerne le contre des ressources fiscales ainsi que la répartition et 1'utilisation du surplus.

Ces six points stappliquent à tout centre urbain médiéval, bien sur, et pas sculement à ccux de la région byzantine. Je pense en particulier que le caractère des élites locales et supra - locales - aristocratie de naissance, de fonction ou les deux- et l'existence ou non d'un appareil étatique central sont particulièrement déterminants pour l'évolution urbaine.

Il pourrait etre intéressant d'envisager maintenant ce qui différencie l'évolution des Balkans et de l'Anatolie de celle de l'Italie byzantine. Sans entrer trop avant dans les détails, j'évoquerai les similitUdes et les contrastes suivants. En tout premier lieu, le processus de rétrécissement et d'appauvrissement, mis en évidence, par exemple, par la diminution des dimensions des églises et par l'utilisation universelle de matériaux de remploi dans les constructions ne semble pas différer en Italie et dans le reste de l'empire. Deuxièmement, un certain nombre de cités, au sens technique romain du terme, dispara'ft également en Italie du VIIe au IXe siècle; et troisièmement les conditions générales y sont semblables à celles des Balkans ou de l'Anatolie, notamment avec les guerres endémiques, destructrices meme si elles se déroulent sur une échelle géographique réduite, qu'engendre l'établissement des Lombards à partir de 568. Mais l'Italie semble demourer une terre de cités et de villes, meme aux VIIe et VIIIe siècles.

Où se situe alors la différence? Trois réponses sont possibles. Tout d'abord, I'Italie est géographiquement plus petite que l'Anatolie, malgré la chame des Appenins qui divise les régions de l'est et celles de l'ouest. Séparées par les montagnes, les plaines et les vallées fertiles forment une mosalque de zones assez densément occupoes, qui se divisent à lcur tour séries de sousunités économiques plus ou moins interdépendantes relativement peu éloignées les unes des autres. L'observaion est importante car elle implique que la moitié de ces centres urbains ont en fait une raison d'etre du point de vue des communications et des échanges locaux. Le fait que les élites préfèrent encore vivre dans les cités locales est significatif à cet égard et il en résulte que les premières villes médiévales italiennes montrent un plus haut degré de continuité dans la culture matérielle qu'aillcurs, et certainement que dans le monde byzantin. La proportion de centres artificiels (quelle que soit l'activité économique que ccux-ci ont pu attirer par moments) était donc probablement plus basse qu'à l'est où beaucoup des cités qui ont dispatu ou ont été réduites à une taille insignifiante étaient des créations purement administratives.

Deuxièmement, la forme de la guerre dans le contexte géographique italien et dans son réseau de cités me fait penser que les villes avaient beancoop plus de chances d'y etre défendues et d'y vivre que d'etre abandonnées ou réduites exclusivement à des centres d'accueil de soldats et d'administratours.

Troisièmement, malgré la présence de Rome, il n'existait pas de "factour Constantinople", pas degrosse perte des ressources en investissements régoliers des élites dans une cour centrale un établissement bureancratique palatin, au détriment des affaires locales. Il y avait beancoup de petits centres. De plus les administrations lafques et ecclésiastiques ont continné à siéger dans les villes. Mais à la différence de l'Anatolie par exemple où tel était également le cas, les conditions économiques étaient aussi rcunies en Italie, car le manque d'intéret des élites pour s'installer dans les cités signifie que la présence d'un élément administratif avait en lui-meme peu d'effet sur lcur activité économique. Pour s'exprimer en d'autres termes, I'état central et sa hierarchie, qui ont agi de manière si parasitaire dans les terres restées à l'empire byzantin après le milieu du VIIe siècle, n'existaient pas en Italie qui; malgré la survie de l'exarcat de Ravenne jusqu'au milieu du VIIIe siècle et les liens avec le dispositif impérial de Constantinople, semble présenter, à mon avis, des agglomérations beancoup plus fortement régionalisées, avec des unités économiquement, socialement et pilitiquement égales.

Je suggère donc que l'ensemble de ces données, échelle géographique, absence de bureaucratie étatique centralisée et de hiérarchie socio-politique expliquent les différences les plus évidentes. Un état fort constituait, dans le monde byzantin, une des causes majeures de l'insignifiance des cités de province.

Je n'ai envisagé jusqu'ici qu'un scul des points qui comptent dans l'évolution des structures socio-économiques byzantines. Mais il y en a d'autres tout aussi importants. D'abord le changement de nature de l'élite sociale de l'empire. La soi-disant "aristocratie sénatoriale" du bas-empire se tronve remplacce au cours du VIIe siècle par une élite différente, composée de "nonveaux hommes" choisis par les emperuers sur une base "méritocratique". Cela s'applique bien sur tout autant à l'Italie byzantine qu'au reste de l'empire.

Il y a des raisons de croire qu'au meme moment le mode de possession des terres et les rapports entre propriétaires, locataires et paysans ont également changé à l'avantage de ces derniers. C'est ce qui semble résulter en partie de la guerre endémique affligeant plusieurs régions d'Anatolie et de lcur dislocation économique et sociale, particulièrement pour celles où les grands domaines étaient la norme au bas-empire - les régions du plateau central anatolien par exemple. Une des conséquences de ces changements a été l'écroulement du monopole des postes clé de l'état détenu par l'ancienne élite sociale, une réduction de l'ensemble de sa force économique en tant que groupe social et, en relation directe avec ces phénomènes, un accroissement proportionnel de l'autorité centrale, alors qu'une partie plus importante de la population est directement soumise au fisc. Les ncuveaux venus dans la hiérarchie administrative et militaire étaient au départ très largement dépendants de l'empercur et des emplois créés à son initiative et cela reflète relativement bien le développement des titres classés "impériaux" (impliquant une relation directe et personnelle avec l'empereur) par opposition à ccux classés "sénatoriaux". En bref, une méritocratie a pris naissance dans les titres et les postes d'état, qui a absorbé les membres capubles de l'ancienne élite. Mais une enquete prosopographique dans les noms de famille et les prénoms des VIIe et VIIIe siècles montre l'éviction presque totale de l'ancienne élite du service de l'état.

Cette emprise croissante sur le dispositif étatique, le monopole des postes militaires et les terres accumulée grace aux récompenses accordées pour ces services ont fait que la méritocratie s'est transformoe en une aristocratie, encore très dépendante aux VIIIe-IXe siècles de l'état, mais de plus en plus indépendante au Xe et surtout au XIesiècle. L'état se tronvait en rivalité directe avec une conche sociale dont l'énorme richesse foncière et les positions solides dans son mécanisme constituaient une réelle menace poue le contre central des ressources fiscales. La position des paysans a empiré non seulement à la suite d'un accaparement des ressources de la part des magnats, mais aussi à cause d'une série de désastres climatiques dans la première moitié du Xe siècle. Mais cette classe ou ce groupe de magnats n'a jamais été vraiment conscient de ses intérets communs en tant que force socio-politique particulière à cette époque. La guerre civile et la lutte entre les empercurs et des éléments de cette élite à la ftn du Xe et au XIe siècles traduisent des rapports épisodiques et concurrentiels entre des clans et des familles.

Comme on l'a aussi vu, cette concurrence s'est également déplacce. Meme si l'histoire idéologique de ces tensions est complexe, les frictions entre les armoes régionales et lcurs chefs locaux d'une part, I'état d'autre part, étaient fondées sur une rivalité pour l'obtention des récompenses et des privilèges accordés par les emperours. Au Xe et plus particulièrement au XIe siècle, les anciens commandants et lcurs soldats sont devenus les nonveaux magnats avec lcur suite; I'augmentation des richesses a fait des villes de province d'importants centres de vie économique, politique et culturelle. L'emprise sur la production urbaine et sur les marchés devient une source signiOcative de richesses; avec comme résultat une certaine réurbanisation de la culture socio-politique, un renversement du modèle qui avait émergé au VIIe siècle.

Il est évident, après ce qui vient d'etre dit, que l'état joue un role fondamental dans l'économie byzantine. En effet les événements du VII siècle ont comporté une réassertion du ponvoir de I'état central sur les tendances décentralisatrices du bas empire. L'état est à la fois limité et tour à tour luimeme déf~ni par la nature des rapports économiques clé, en particulier ccux qui régissent les modalités de l'appropriation et de la répartition des surplus. Cela est très clair en ce qui concerne l'émission et la circulation des monnaies qui, meme si on prend en compte les énormes fluctuations à la fois dans la pureté du HOmisma d'or et de ses divisions et dans la répartition et la qualité du système monétaire basé sur le bronze, sont restoes le mécanisme de base grace anquel l'état a converti la richesse sociale en ressou-rces fscales. A partir du règne d'Héraclius dans la première moitié du VIIe siècle, le monnayage est devenu extremement centralisé.

La monnaie était principalement émise pour graisser les roues de la machine étatique, dans un système qui peut etre défni comme un mécanisme fiscal redistributeur. L'Etat fournissait l'or sous forme de salaires et de largesses à sa bureancratie et aux armoes qui en échangeaient une partie substantielle contre des biens et des services pour son propre entretien. L'Etat était ainsi en mesure de récupérer la plupart des pièces qu'il avait mises en circulation par le biais de taxes, surtout depuis que les règlements fiscaux exigeaient en général les impots en or et offraient lur conversion en bronze. Il y a eu des périodes au cours desquelles les ressources monétaires liquides ont été insuffisantes et où l'état a du prendre des dispositions adhoc, pour ravitailler en nature les soldats dans les provinces par exemple, et pour augmenter les taxes sous forme de corvées étatiques ou d'autres impositions. Mais les effets d'ensemble de ce monopole étatique et le poids de l'appareil fiscal sur la population active sont généralement admis; ils bloquaient tout investissement dans les échanges commerciaux qui ne faisaient pas partie du processus fiscal; et, dans une société où toutes les formes de statut social et d'avancement étaient lices à l'état (y compris l'identité propre de l'aristocratie), c'était un énorme oUstacle à l'expansion du sectour économique qui n'était pas directement liéauxactivités de l'état. cette sitUation elle-meme aconnu bien surdes variations.: I'augmentation de la production agricole et de la population, et par conséquent celle de l'imput de base de 1'état aux XIe et XIIe siècles, parait avoir été doublée d'un développement semblable du marché des échanges locaux et la production de deurées à petite échelle. Mais les demandes du système étatique et le fait que l'élite sociale soit restoe étroitement lice à l'état ont empeché le développoment de relations de marché entièrement libérées de l'intervention de l'état. Les effets du maintien d'un état centralisé peuvent etre ici observés avec précision. Et j'ai exclu de cet exposé de plus amples développements sur les problèmes importants et complexes que pose le role de l'idéologie poiltique impériale dans un tel contexte.

La position centrale de l'état se lit de la meme facon dans l'histoire de ses efforts pour conserver le contr61e flscal de ses ressources. La tension entre l'aUtorité de l'état central et l'élite des propriétaires fonciers où on voit en action toutes les manières dont l'état peut estimer, augmenter et distribuer les surplus résume cette position. La capacité de l'état à controler pleinement et directement les impots de base a déterminè la manière dont 1'aristocratie byzantine s'est développee. Les guerres civiles et les crises fiscales du gouvernement central à la fin du Xe et au XIe siècle, les changements correspondants aussi bien dans les modes de recrutement et la source des effectifs de l'arm6e, que dans l'administration civile et flscale peuvent tous etre mis en relation avec la nature des rapports entre 1'ótat et sa base flscale.

Je ne sous-entend ancunement que l'ótat est dune facon ou d'une autre la "cause" des rapports économiques. Mais si on le dóflnit au sens large du terme, plutot qu'au sens étroit d'ensemble d'institutions administratives, on peut dire qu'il est en lui-meme un rdseau de relations 6conomiques, du fait qu'il est une structure et donne à la fois une ossature aux rapports sociaux de production dans lesquels il est eoraciné. Sans aucun doute, les demandes de l'état et ses rapports avec la population active et les élites determinent les caractères du fonctionnement de l'economie. Le système fiscal 6tait extremement complexe; I'idéologie politique imperiale a domine 1'univers symbolique ou Weltanschanung de toutes les structures byzantines, les représentants des appareils civils et militaires étant omniprésents. Les transformations sociales et les conflits qui ont surgi dans l'état ne ponvaient par conséquent exister que grace à 1'ótat meme' d'une manière qui n'est pas suffisament prise en considération. Byzance reprdsente, de plusieurs facons, I'opposé exact des développoments socio-politiques qui caract6risent, par esemple, le royaume mbrovingien. Il ne faut certes pas exagErer ces relations, mais rappeler que, dans une sociét6 pró-industrielle, il y a mille cas où le controle 6tatique à un niveau "micro-structurel" de 1'existence sociale, avait peu d'influence. Mais le point que je veux souligner ici est le suivant: l'économie était à la fois fondement et résultat de l'existence de 1'ótat romain d'Orient. L'un ne peut etre bien compris sans l'autre. Et alors que cela est vrai, dans un sens, pour n'importe quel système social complexe, c'est un point qu'il faut avoir prdsent à 1'esprit lorsqu'on tente de mettre en evidence les relations causales qui entrainent un changement 6conomique et social.

JOHN HALDON

_________________
https://www.facebook.com/LesHerculiani

Damianus/Damien.


Haut
 Profil Envoyer un e-mail  
 
 Sujet du message: Re: Remarques sur l'économie romaine et byzantine. Nouveau.
Nouveau messagePublié: 07 Sep 2008, 23:37 
Hors-ligne
Avatar de l’utilisateur

Inscrit le: 04 Sep 2008, 19:30
Messages: 2747
Localisation: Laigneville
Il s'agit d'un texte très intéessant mais en gande partie numérisé. Veuillez en excuser les nombreuses coquilles qui s'y sont glissées.

_________________
https://www.facebook.com/LesHerculiani

Damianus/Damien.


Haut
 Profil Envoyer un e-mail  
 
Afficher les messages depuis:  Trier par  
Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 2 messages ] 

Heures au format UTC + 1 heure [ Heure d’été ]


Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant actuellement ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 33 invités


Vous ne pouvez pas publier de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas insérer de pièces jointes dans ce forum

Sauter vers:  
cron
Powered by phpBB © 2000, 2002, 2005, 2007 phpBB Group
Translated by phpBB.fr © 2007, 2008 phpBB.fr
Thème 3myl_sable réalisé par SGo