SOURCES LITTERAIRES
AMMIEN MARCELLIN
XVIII, 8, 7. Eté 359 : offensive perse en Mésopotamie. L’armée d’Urcisin est surprise près d’Amida par la cavalerie perse.
« 7. Quae dum in curriculo semihorae aguntur, postsignani nostril, qui tenebant editiora collis, exclamant aliam cataphractorum multitudinem equitum pone uisam celeritate qua maxima propinquare. »
« 7. Tout cela se passait en l’espace d’une demi-heure ; les soldats de notre arrière-garde, qui occupaient le sommet de la colline, signalent par leurs cris qu’une foule de cuirassiers apparue sur nos arrières approche à toute vitesse. »
XIX, 7, 4. Offensive perse pendant le siège d’Amida (359).
« 3. Et albescente iam die, ferrea munimenta membrorum caelum omne subtexunt densitate ; quae acies non inordinatim ut antea, sed tubarum sonitu leni ductante, nullis procursantibus incedebant, machinarum operti tegminibus cratesque uimineas praetendentes. 4. Cumque propinquantes ad coniectum uenire telorum, oppositis scutis, Persae pedites sagittas tormentis excussas e muris aegrius euitantes, laxarunt aciem, nullo paene iaculi genere in uanum cadente ; etiam cataphracti, hebetati et cedentes, animos auxere nostrorum. »
« 3. Pui au lever de l’aube, apparaissent des hommes cuirassés de fer, en ordre si serré qu’ils voilent la vue du ciel ; et ces armées ne s’avançaient plus en désordre comme précédemment, mais elles obéissaient aux sons modulés des trompettes ; personne ne se détachait en avant des rangs, tous étaient à couvert sous le toit des tonnelles ou se protégeaient derrière des boucliers d’osier tressé. 4. Mais quand, en progressant, ils parviennent à portée de trait, les fantassins perses, qui évitaient à grand peine, malgré a couverture de leurs écus, les flèches décochées par les machines depuis les remparts, relâchèrent leur ordre de bataille, en voyant qu’à peu près tous nos projectiles faisaient mouche ; même les cuirassiers furent paralysés et se retirèrent, redoublant ainsi l’ardeur des nôtres. » (trad. G. Sabbah)
XX, 7, 2. La place de Bézabde, défendue par trois légions, est prise d’assaut par Sapor (360).
« 2. Primo igitur impetu, cum agmine cataphractorum fulgentium rex ipse sublimior ceteris castrorum ambitum circumcursans, prope labra ipsa fossarum uenit audentius, petitusque ballistarum ictibus crebris et sagittarum densitate opertus armorum in modum tesudinis contextorum, abscessit innoxius. »
« 2. Or donc, lors du premier assaut, en caracolant autour de l’enceinte de la forteresse, escorté par un détachement de cataphractes étincelants, le Roi en personne, dont la taille dépassait celle de tous les autres, s’en vint bien témérairement tout près du glacis même des fossés, et pris sous un tir nourri de projectiles de balistes et de flèches, il quitta les lieux à l’abri de boucliers serrés, assemblé à la manière d’une tortue, et s’en tira indemne. »
XXIV, 6, 8. Lors de la campagne de Julien sur l’Euphrate (363)
« 8. Contra haec Persae obiecerunt instructas cataphractorum equitum turmas, ita confertas ut lamminis cohaerenter aptati corporum flexus splendore praestringerent occursantes obtutus, operimentis scorteis equorum multitudine omni defensa, quorum in subsidiis manipuli locati sunt peditum, contecti scutis oblongis et curuis, quae texta uimine et coriis crudis gestantes densius se commouebant. »
« 8. A cette attaque, les Perses opposèrent les escadrons rangés de leur cavalerie cuirassée, si serrés que les articulations de leurs corps, étroitement épousées par les lamelles de métal, éblouissaient de leur éclat les regards de ceux qui couraient à leur rencontre, et toute la multitude de leurs chevaux était protégée par des caparaçons de cuir. Pour les appuyer, on avait disposé des manipules d’infanterie qui manœuvraient en formations compactes, en se couvrant tout entier de leurs longs boucliers courbes à la contexture d’osier et de cuir cru. » (trad. J. Fontaine).
XXV, 1, 1. Lors de la retraite de l’armée romaine.
« 1. […] Ubi uero primum dies inclaruit, radiantes loricae limbis circumdatae ferreis, et corusci thoraces, longe prospecti, adesse regis copias indicabant ».
« 1. […] Mais aussitôt que le jour commença de luire, on vit rutiler au loin les armures cerclées de ceinturons de fer, et étinceler les cuirasses, qui signalaient la présence des troupes du Roi. » (trad. J. Fontaine)
Le motif de l’éclat des armes et des armures des cataphractes perses est récurrent chez Ammien Marcellin. Végèce insiste lui aussi sur la terreur qu’inspire cet élément de la guerre psychologique : « plurimum enim terroris hostibus armorum splendor importat. Quis credat militem bellicosum cuius dissimulatione, situ ac rubigine arma foedantur ? » (2, 14). Notation convergente de Tacite, Germ. 43, 6 : « primi in omnibus proeliis oculi uincuntur ».
XXV, 1, 11-13.
« 11. Hoc etiam loco relicto, cum ad tractum Maranga appellatum omnis uenisset exercitus, prope lucis confinia inmensa Persarum apparuit multitude, com Merena equestris magistro militia, filiisque regis duobus, et optimatibus plurimis. 12. Erant autem omnes cateruae ferratae, ita per singula membra densis lamninis tectae, ut iuncturae rigentes conpagibus artuum conuenirent, humanorumque uultuum simulacra ita captitibus diligenter aptata ut, inbratteatis corporibus solidis, ibis tantum incidentia tela possint haerere, qua per cauernas minutas, et orbibus oculorum adfixas, parcius uisitur, uel per supremitates narium angusti spiritus emittuntur. 13. Quorum pars contis dimicatura, stabat immobilis, ut retinaculis aereis fixam existimares, iuxtaque sagittarii, cuius artis fiducia ab incunabulis ipsis gens praeualuit maxima, tendebant diuaricatis brachiis flexiles arcus […] »
« 11. Ayant quitté ces lieux à leur tour, toute l’armée avait atteint la région dite de Maranga, quand aux environs de l’aube, apparaît une foule immense de Perses, accompagnés du maître de la cavalerie Méréna, de deux fils du Roi et de plusieurs grands. 12. Et l’ensemble de ces troupes était bardé de fer : tous leurs membres si bien recouverts de lamelles serrées que leur assemblage rigide s’ajustait exactement aux articulations, et leurs heaumes en forme de visages humains1 si minutieusement adaptés à leurs têtes que, leurs corps étant entièrement revêtus d’écailles de métal2, les projectiles qui les frappent ne peuvent trouver prise que s’ils pénètrent à l’endroit où des orifices minuscules, plaqués contre le globe oculaire, leur permettent tout juste de voir, ou bien à l’extrémité des narines, où leur respiration s’exhale par d’étroites issues. 13. Une partie d’entre eux, prêts à combattre avec des piques3, se tenaient immobiles4, si bien qu’on les aurait crus retenus sur place par des rênes de bronze, et à leurs côtés des archers – c’est un art dans lequel ce peuple a toujours excellé dès le berceau avec une sûreté extraordinaire –, tendaient de leurs bras écartés de souples arcs […] » (trad. J. Fontaine)
Notes du traducteur :
« 1 La comparaison avec des statues, déjà développée par Ammien à propos des clibanaires romains (16, 10, 8), se retrouve sous la plume de Julien lui-même, Or. A, 37 d. et dans Claudien in Rufin. 2, 359 et VI. Cos. Hon. 573 et aussi dans les Etiopiques d’Héliodore 9, 15. Mais dans la présente description, Ammien s’inspire probablement de Libanius dans son discours 59, 69, où il peint les cataphractaires de Constance. » « 2 La brattea est une mince lamelle de métal (« tenuissima lamina », dit Isidore, etym. 16, 18, 2) ; le mot s’emploie surtout pour les feuilles d’or battu, en particulier celles qui servent à recouvrir les statues faites d’un autre métal, en les dorant « à la feuille ». C’est justement avec cette valeur technique qu’Ammien utilise le mot dans les deux autres passages où il y recourt : 14, 6, 8, « easque (statuas) auro curant imbratteari » ; et 17, 4, 15, « eisque (obelisco) sphaera superponitur aenea, aureis laminis nitens… (cette sphère ayant été foudroyée)… facis imitamentum infigitur aereum, itidem auro inbratteatum ». Il ne fait donc pas de doute que l’emploi du verbe imbratteare file ici savamment la métaphore de la statue, amorcée par le mot simulacra. » « 3 Utilisé en 18, 5, 6 pour désigner une gaffe de batelier, l’hellénisme contus désigne ici la pique caractéristique de la cavalerie perse, en usage depuis le temps des Parthes comme le montre Plutarque, Crassus 25 et 27 ; Végèce en use couramment aussi pour désigner la lance des cavaliers. Comme les cuirasses empruntées par les clibanaires romains aux cataphractaires perses, l’arme, sous sa forme tardive, a-t-elle été aussi empruntée par l’armée romaine à ses adversaires d’Orient, séleucides puis perses ? Déjà cité dans l’armement des Troyens de Virgile, le contus apparaît, dans l’historiographie romaine, à travers les récités des affrontements entre les Romains et les Parthes d’une part, et le Sarmates de l’autre, comme une arme caractéristique des cataphractaires chez ces barbares d’Orient : voir Tact. Ann. 6, 41, 2 (sous Tibère, en Arménie), et Hist. 1, 79, 7 (en l’an 69, en Mésie). Mais ces mentions tacitéennes n’excluent pas que le mot ait déjà pu apparaître dans les Histoires de Salluste, au cours de son récit des campagnes romaines du début du Ier siècle av. J.-C. en Orient. La lance classique des cavaliers romains était l’hasta ; il est probable que la différence des mots implique aussi celle des armes mêmes. « « 4 L’immobilité impressionnante de cette cavalerie lourde tient d’abord à sa difficulté de mouvement : dans ses pages sur la défaite de Crassus, Plutarque cite le cas de cavaliers parthes qui, tombés, sont dans l’incapacité de se relever. Cette immobilité est un nouveau trait ajouté à la métaphore du cavalier statue. »
XXV, 3, 4. 26 juin 363. Toujours lors de la retraite de Julien, nouvelle embuscade perse contre les colonnes romaines, fatale à l’empereur.
« 4.Quae dum sine respectu periculi sui redintegrare festinat, ex alia parte cataphractorum Parthicus globus centurias adoritur medias, ac sinistro cornu inclinato acriter superfusus, foetorem elephantorumque stridorem inpatienter tolerantibus nostris, contis et multiplicatis missilibus decernebat. »
« 4. Au moment où il s’empresse de redresser cette situation sans considérer le risque qu’il courait, une masse de cuirassiers parthes attaque le centre de nos centuries à partir d’un autre point et, submergeant impétueusement notre aile gauche qui venait de plier, elle emporte la décision en faisant pleuvoir piques et traits, tandis que les nôtres supportaient à grand’peine la puanteur et le cri strident des éléphants. » (trad. J. Fontaine)
XXV, 6, 2. Les Romains, presses de batter en retraite hors de Perse, sont harcelés dans leur progression par des accrochages répétés de la part des Perses.
« 2. Proinde egredi iam coeptantes adoriuntur nos elephantis praeuiis Persae, ad quorum faetorem accessumque terribilem equis inter initia turbatis et uiris, Iouiani et Herculiani, occisis beluis paucis et cataphractis equitibus acriter restiterunt. »
« 2. En conséquence, nous commencions déjà à en sortir, quand les Perses nous attaquent, précédés de leurs éléphants ; devant leur puanteur et leur avance terrifiantes, chevaux et hommes furent d’abord épouvantés, mais les Joviens et les Herculiens, après avoir tué quelques-unes de ces énormes bêtes, résistèrent aussi avec âpreté à la cavalerie cuirassée. »
XXIX, 1, 1. En 371, Romains et Perses continuent à s’affronter en Arménie, sans résultat décisif.
« 1. Exacta hieme, rex Persarum gentium Sapor, pugnarum fiducia pristinarum inmaniter adrogans, supleto numero suorum abundeque firmato, erupturos in nostra cataphractos et sagittarios et conductam misit plebem. 2. Contra has copias, Traianus comes et Vadomarius ex rege Alamannorum cum agminibus perrexere perualidis, hoc obseruare principis iussu adpositi ut arcerent potius quam lacesserent Persas. 3. Qui cum uenissent Vagabanta, legionibus habilem locum, rapidos turmarum procursus hostilium in se ruentium acriter exceperunt inuiti, operaque consulta retrocedentes, ne ferro uiolarent aduersorum quemquam primi et iudicarentu discissi foederis rei, ultima trudente necessitate, congressi sunt confossisque multis discessere uictores. »
« 1. L’hiver terminé le roi des peuples perses Sapor, avec une monstrueuse assurance affermie par les combats precedents, compléta et renforça largement l’effectif des siens et envoya des cataphractes, des archers et un rassemblement de piétaille envahir nos territories. 2. Contre ces troupes, le comte Trajan et Vadomarius, ancien roi des Alamans, marchèrent avec de très fortes colonnes ; mais, par ordre de l’empereur, ils avaient reçu mission de tenir les Perses plutôt que de les provoquer. 3. Arrivés à Vagabanta, place convenant aux légions, ils essuyèrent, dans l’avoir voulu, les chocs impétueux des escadronts ennemis qui se jetaient violemment contre eux. Ils reculèrent alors délibérément de peur de blesser les premiers par le fer l’un de leurs adversaires et de se voir accuser de la rupture du traité ; mais, pressé par la dernière nécessité, ils engagèrent le combat et, ayant percé de coups nombre d’ennemis, se retirèrent victorieux. » (trad. G. Sabbah)
APPIEN
Le livre Syriaque, 32-34. Rencontre des Romains avec les cataphractes d’Antiochus III, à la bataille de Magnésie.
« XXXII. 161. Voilà donc l’ordre de bataille adopté par les Romains. Antiochos disposait de son côté d’une armée dont l’effectif total s’élevait à soixante-dix mille hommes, dont la phalange des Macédoniens consistituait l’élément le plus solide – seize mille hommes encore équipés à la façon des soldats de Philippe et d’Alexandre. 162. Il les plaça au centre, répartis en dix bataillons de mille six cents hommes. Chacun de ces bataillons alignait cinquante hommes de front sur trente-deux de profondeur, et chacun était flanqué de vingt-deux éléphants. La phalange avait l’aspect d’un rempart et les éléphants de tours. 163. Telle était l’infanterie d’Antiochos ; de part et d’autre de celle-ci des cavaliers avaient été rangés – des Galates, des cataphractes (kataphraktoi) et ce que l’on appelle l’agèma des Macédoniens. Eux aussi sont des cavaliers d’élite, et c’est pourquoi ont les appelle « agèma ». 164. Ces unités se trouvaient dans l’alignement de la phalange, de part et d’autre. Après celles-ci, avaient pris position aux ailes : à droite, un certain type de fantassins armés à la légère et des cavaliers du corps des Compagnons, armés de boucliers d’argent, ainsi que mille deux cents archers à cheval ; à gauche, des peuplades galates (Tectosages, Trocmes, Tolistoboi), un certain nombre de Cappadociens envoyés par Ariarathe, puis des mercenaires d’origine diverses, puis une autre cavalerie cataphracte, et ce que l’on appelle la cavalerie des Compagnons, armées à la légère. 165. Voilà quel était le dispositif adopté par Antiochos. Il semble avoir mis ses espoirs dans ses cavaliers, qu’il disposa en grand nombre en première ligne, et aussi fait preuve d’incompétence militaire en concentrant dans un petit espace sa phalange en formation serrée. »
« XXXIII. 173. […] après elles, ce fut le tour de la cavalerie des cataphractes [d’être mis en difficulté par des chars à faux alliés] qui, en raison de leur lourd équipement, ne pouvaient esquiver les chars aisément. »
« XXXIV. […] 176. Ils lui obéirent et leur charge irresistible mit en fuite ces unites ainsi que les troupes qui leur étaient associées, cavaliers et cataphractes, parmi lesquels depuis longtemps les chars mettaient le désordre : ils rattrapaient et massacraient surtout ces derniers, que leur lourdeur empêchait d’esquiver ou de volter aisément. » (trad. P. Goukowsky)
DION CASSIUS
XL, 15. Description de l'armée parthe au temps de la campagne de Crassus.
15. Περὶ μὲν οὖν τοῦ τε γένους καὶ τῆς χώρας, τῆς τε ἰδιότητος τῶν ἐπιτηδευμάτων αὐτῶν, πολλοῖς τε εἴρηται καὶ ἐγὼ οὐκ ἐν γνώμῃ ποιοῦμαι συγγράψαι. Τῇ δὲ δὴ ὁπλίσει, καὶ τῇ τῶν πολέμων διαχειρίσει (τούτων γὰρ ὁ ἐξετασμὸς τῷδε τῷ λόγῳ, ὅτι καὶ ἐς χρείαν αὐτῶν ἀφικνεῖται, προσήκει) τοιᾷδε χρῶνται. Ἀσπίδι μὲν οὐδὲν νομίζουσιν· ἱπποτοξόται δὲ καὶ κοντοφόροι, τὰ πολλὰ κατάφρακτοι, στρατεύονται· πεζοί τε, ὀλίγοι μὲν, καὶ οἱ ἀσθενέστεροι, τοξόται δ' οὖν καὶ ἐκεῖνοι πάντες εἰσίν· ἔκ τε γὰρ παίδων ἀσκοῦνται, καὶ ὁ οὐρανὸς ἥ τε χώρα αὐτοῖς συναίρεται πρὸς ἀμφότερα. Αὕτη τε γὰρ πεδιὰς ὡς πλήθει οὖσα, ἀρίστη τε ἵππους τρέφειν ἐστὶ, καὶ ἐπιτηδειοτάτη καθιππεύεσθαι. Ἀγέλας γοῦν ὅλας καὶ ἐν τοῖς πολέμοις, ὥστ' ἄλλοτε ἄλλοις ἵπποις χρῆσθαι, καὶ πόρρωθέν τε ἐξαπιναίως ἐπελαύνειν, καὶ μακράν ποι ἐξ αἰφνιδίου ἀποχωρεῖν, ἐπάγονται. Καὶ ὁ οὐρανὸς ὁ ὑπὲρ αὐτῶν, ξηρότατός τε ὢν, καὶ ἰκμάδα οὐδὲ ἐλαχίστην ἔχων, ἐντονωτάτας σφίσι τὰς τοξείας, πλὴν τοῦ πάνυ χειμῶνος παρέχεται.
« 15. Plusieurs écrivains ont fait connaître leur origine, leur pays, leurs coutumes, leurs moeurs : je n'ai donc pas l'intention de m'en occuper. Quant à leurs armes et à leur manière de faire la guerre, ces détails doivent trouver ici une place, puisqu'ils forment une partie essentielle de leur histoire. Voici ce que j'ai à en dire : ils ne font pas usage du bouclier, ils combattent à cheval comme archers et comme lanciers, et sont cuirassés le plus souvent. Il y a chez eux peu de fantassins, et on ne les prend que parmi les hommes les plus faibles ; mais eux aussi sont tous armés d'arcs. Dès l'âge le plus tendre, les Parthes sont habitués à manier l'arc et le cheval : ce double exercice est secondé par le climat et par le pays. Et en effet, leur pays, qui forme presque tout entier une plaine, est très favorable à la nourriture des chevaux et aux courses de cavalerie. Aussi, lorsqu'ils partent pour la guerre, ils emmènent avec eux tous leurs chevaux, afin de pouvoir changer de monture, fondre sur l'ennemi à l'improviste et d'une grande distance, ou s'enfuir au loin tout à coup. »
XL, 22. Affrontements précédant la bataille de Carrhes.
22. Γενομένου δὲ τούτου, οἱ πεζοὶ τῶν Ῥωμαίων οὐκ ἀπετράποντο μέν, ἀλλὰ καὶ προθύμως τοῖς Πάρθοις, ὡς καὶ τιμωρήσοντες αὐτῷ, συνέμιξαν· οὐ μέντοι καὶ ἄξιόν σφων οὐδὲν, ἔκ τε τοῦ πλήθους καὶ ἐκ τοῦ τρόπου τῆς μάχης αὐτῶν, ἄλλως τε καὶ ὑπὸ τοῦ Αὐγάρου ἐπιβουλευθέντες, ἐποίησαν. Εἴτε γὰρ συνασπίσαι ἔγνωσαν, ὡς καὶ τῇ πυκνότητι τῆς τάξεώς σφων τὰ τοξεύματα αὐτῶν ἐκφευξόμενοι, προσπίπτοντές σφισιν οἱ κοντοφόροι ῥύμῃ τοὺς μὲν κατέβαλλον, τοὺς δὲ πάντως γοῦν ἐσκεδάννυσαν· εἴτε καὶ διασταῖεν, ὅπως τοῦτό γε ἐκκλίνοιεν, ἐτοξεύοντο. Κἀν τούτῳ πολλοὶ μὲν καὶ ἐξ αὐτῆς τῆς προσελάσεως τῶν κοντοφόρων ἐκπληττόμενοι ἔθνησκον, πολλοὶ δὲ καὶ ὑπὸ τῶν ἱππέων ἐγκαταλαμβανόμενοι ἐφθείροντο· ἄλλοι τοῖς κοντοῖς ἀνετρέποντο, ἢ καὶ ἀναπειρόμενοι ἐφέροντο.
22. Les fantassins romains, loin de fuir, se battirent avec ardeur pour venger sa mort ; mais ils ne firent rien qui fût digne d'eux, soit à cause du nombre des ennemis, soit à cause de leur manière de combattre, et surtout parce qu'Augarus semait les piéges sous leurs pas. Voulaient-ils former la tortue, pour échapper aux flèches des barbares, en se pressant les uns contre les autres ? les lanciers (kontophoroi) parthes fondaient sur eux avec impétuosité, les renversaient, ou tout au moins les dispersaient. Marchaient-ils séparés les uns des autres, pour éviter un choc ? ils étaient atteints par les flèches des Parthes. Ainsi plusieurs périssaient, frappés d'épouvante par la brusque attaque des lanciers ; plusieurs étaient enveloppés et massacrés par la cavalerie ; d'autres étaient renversés à coup de pique (kontos), ou percés d'outre en outre et traînés sur le sol.
XL, 24.
24. Κἂν πασσυδὶ ἀπώλοντο, εἰ μὴ οἵ τε κοντοὶ τῶν βαρβάρων
24. Ils auraient péri jusqu'au dernier, si les lances des Parthes n'avaient pas été courbées ou brisées
XLIX, 20. Victoire de Ventidius contre les Parthes
20. Καὶ οὕτως ἐν τῇ Συρίᾳ αὐτῷ τῇ Κυρηστικῇ γενομένῳ συμβαλὼν ἐνίκησεν. Ἐπειδὴ γὰρ οὔτε τὸν ποταμὸν διαβῆναί σφας ἐκώλυσεν οὔτ´ αὖ διαβᾶσιν εὐθὺς ἐπέθετο, μαλακίαν τέ τινα καὶ ἀρρωστίαν τῶν Ῥωμαίων κατέγνωσαν, κἀκ τούτου πρὸς τὸ ἔρυμα αὐτῶν καίπερ ἐν μετεώρῳ ὂν προσήλασαν ὡς καὶ αὐτοβοεί σφας αἱρήσοντες. Ἐπεκδρομῆς τε αἰφνιδίου γενομένης κατά τε τοῦ πρανοῦς οὐ χαλεπῶς, ἅτε καὶ ἱππῆς ὄντες, ἀπεώσθησαν, κἀνταῦθα ἀνδρείως μὲν ἀμυνόμενοι (κατάφρακτοι γὰρ οἱ πλείους αὐτῶν ἦσαν)
20. Ventidius, grâce à ce stratagème, vainquit Pacorus dans un engagement en Syrie Cyrrhestique. Comme il ne mit point obstacle au passage du fleuve et qu'il n'attaqua pas les Barbares aussitôt passés, ceux-ci jugèrent les Romains lâches et sans courage, et, dans cette opinion, ils s'élancèrent contre leur camp, bien qu'il fût placé sur une hauteur, espérant l'emporter d'emblée. Mais une sortie eut lieu tout à coup, et, comme ils étaient à cheval, ils furent repoussés sans peine sur un terrain en pente; bien qu'ils se défendissent vaillamment (la plupart étaient des cataphractes),
XLIX, 26. Campagne d'Antoine contre les Parthes
26. Ὁ δ´ Ἀντώνιος ἠπείχθη μὲν πρὸς τὴν πρώτην πεμφθεῖσάν οἱ ὑπὸ τοῦ Στατιανοῦ ἀγγελίαν ὡς καὶ βοηθήσων αὐτῷ, ὑστέρησε δέ· ἔξω γὰρ τῶν νεκρῶν οὐδένα εὗρε. Καὶ κατὰ μὲν τοῦτ´ ἐφοβήθη, ὅτι δὲ οὐδενὶ τῶν βαρβάρων ἐνέτυχεν, ὑπετόπησέ τε ἀπεληλυθέναι ποι αὐτοὺς ὑπὸ δέους καὶ ἀνεθάρσησε. Κἀκ τούτου συμβαλών σφισιν οὐ πολλῷ ὕστερον τροπὴν μὲν αὐτῶν ἐποιήσατο· οἱ γὰρ σφενδονῆται πολλοί τε ὄντες καὶ μακροτέραν τῶν τόξων ἱέντες πάντα καὶ τὸν κατάφρακτον ἰσχυρῶς ἐλυμαίνοντο· οὐ μέντοι καὶ ἀξιόλογόν τι πλῆθος ἔφθειρεν· οἱ γὰρ βάρβαροι διὰ ταχέων ἵππευον.
26. Antoine, au premier avis qu'il avait revu de Statianus, s'était hâté d'aller à son secours ; mais il arriva trop tard, il ne trouva plus que des cadavres. Il en fut effrayé ; mais, comme il ne rencontra aucun Barbare, il pensa que la crainte les avait fait déloger, et se rassura. Par suite, dans un engagement qu'il eut avec eux peu de temps après, il les mit en fuite ; car les frondeurs, qui étaient en grand nombre, et dont les coups atteignaient plus loin que les flèches, portèrent le ravage, même parmi les cataphractes, sans cependant en faire périr une quantité notable, parce que les Barbares, sur leurs chevaux, s'enfuirent rapidement.
HELIODORE
Ethiopiques, IX, 15. (voir aussi peut-être de 14 à 18).
« Voici quelle est la forme de leur armure. L'homme est choisi pour sa vigueur exceptionnelle. Il est coiffé d'un casque compact, fait d'une seule pièce, qui, tel un masque, représente exactement une figure humaine et recouvre entièrement la tête depuis le sommet du crane jusqu'au cou, sauf les yeux, pour permettre de voir. Sa main droite est armée d'une lance (kontos) plus longue qu'une haste (lonkhè); la main gauche reste libre pour tenir les rênes. Une épée (kopis) est suspendue à son coté. La poitrine et tout le reste du corps sont cuirassés. Voici comment est faite la cuirasse; des plaques de bronze et de fer, quadrangulaire, et d'un empan dans chaque sens, sont liées entre elles par leurs extrémités, s'imbriquant les unes dans les autres dans le sens de la hauteur et dans le sens de la largeur, d'une façon continue. Elles sont attachées ensemble par-dessous par des liens lâches à l'endroit où elles se rejoignent. C'est comme un vêtement d'écailles qui adhère au corps sans le blesser et l'enveloppe complètement, entourant chaque jambe séparément sans gêner les mouvements, car il peut se contracter et s'allonger. Elle a des manches et va du col au genou, ouverte seulement à hauteur des cuisses pour permettre à l'homme de monter à cheval. Sur une telle cuirasse, le traits rebondissent et nulle blessure n'est à redouter. La cnémide va de la pointe du pied au genou et s'attache à la cuirasse. Une armure semblable protège aussi le cheval: ses membres sont entourés de jambières; sa tête complètement couverte de plaques frontales; de son dos pend de chaque coté, sur les flancs, une housse de lames de fer qui le protège, tout en laissant libre le dessous du ventre afin de ne pas gêner sa course. Le cheval ainsi armé et pour ainsi dire enchâssé, le cavalier l'enfourche; mais il ne se hisse pas seul; il faut qu'on le soulève à cause de son poids. Et quand arrive le moment du combat, il lâche la bride, éperonne sa monture et s'élance de toute sa fougue sur l'ennemi, pareil à un homme de fer ou à une statue sculptée dans la masse qui se mettrait en mouvement. Le kontos horizontale darde au loin sa pointe. Il est soutenu du coté du fer par un lien attaché au col du cheval, tandis que sa poignée est fixée à la croupe par un lacet. Ainsi il ne cède pas sous les chocs, mais aide la main du cavalier qui n'a qu'à diriger le coup. L'homme se raidit et s'arc-boute pour faire une blessure plus profonde, et son élan est si impétueux qu'il transperce tout ce qu'il trouve devant lui, et souvent, d'un seul coup, désarçonne deux ennemis à la fois. » (traduction d'après J. Maillon)
PAUSANIAS
Description de la Grèce, I, 21, 5-6. Description de l'équipement des Sarmates.
« 5. Ἐνταῦθα ἄλλα τε καὶ Σαυροματικὸς ἀνάκειται θώραξ· ἐς τοῦτόν τις ἰδὼν οὐδὲν ἧσσον Ἑλλήνων τοὺς βαρβάρους φήσει σοφοὺς ἐς τὰς τέχνας εἶναι. Σαυρομάταις γὰρ οὔτε αὐτοῖς σίδηρός ἐστιν ὀρυσσόμενος οὔτε σφίσιν ἐσάγουσιν· ἄμικτοι γὰρ μάλιστα τῶν ταύτῃ βαρβάρων εἰσί. Πρὸς οὖν τὴν ἀπορίαν ταύτην ἐξεύρηταί σφισιν· ἐπὶ μὲν τοῖς δόρασιν αἰχμὰς ὀστεΐνας ἀντὶ σιδήρου φοροῦσι, τόξα τε κράνινα καὶ ὀιστοὺς καὶ ὀστεΐνας ἀκίδας ἐπὶ τοῖς ὀιστοῖς· καὶ σειραῖς περιβαλόντες τῶν πολεμίων ὁπόσους καὶ τύχοιεν, τοὺς ἵππους ἀποστρέψαντες ἀνατρέπουσι τοὺς ἐνσχεθέντας ταῖς σειραῖς.
6. Τοὺς δὲ θώρακας ποιοῦνται τὸν τρόπον τοῦτον. Ἵππους πολλὰς ἕκαστος τρέφει, ὡς ἂν οὔτε ἐς ἰδιωτῶν κλήρους τῆς γῆς μεμερισμένης οὔτε τι φερούσης πλὴν ὕλης ἀγρίας ἅτε ὄντων νομάδων· ταύταις οὐκ ἐς πόλεμον χρῶνται μόνον, ἀλλὰ καὶ θεοῖς θύουσιν ἐπιχωρίοις, καὶ ἄλλως σιτοῦνται. Συλλεξάμενοι δὲ τὰς ὁπλὰς, ἐκκαθήραντές τε καὶ διελόντες, ποιοῦσιν ἀπ᾽ αὐτῶν ἐμφερῆ δρακόντων φολίσιν· ὅστις δὲ οὐκ εἶδέ πω δράκοντα, πίτυός γε εἶδε καρπὸν χλωρὸν ἔτι· ταῖς οὖν ἐπὶ τῷ καρπῷ τῆς πίτυος φαινομέναις ἐντομαῖς εἰκάζων τὸ ἔργον τὸ ἐκ τῆς ὁπλῆς οὐκ ἂν ἁμαρτάνοι. Ταῦτα διατρήσαντες καὶ νεύροις ἵππων καὶ βοῶν συρράψαντες χρῶνται θώραξιν οὔτε εὐπρεπείᾳ τῶν Ἑλληνικῶν ἀποδέουσιν οὔτε ἀσθενεστέροις· καὶ γὰρ συστάδην τυπτόμενοι καὶ βληθέντες ἀνέχονται. »
« 5. On voit aussi dans ce temple une cuirasse Sarmate, qui prouve que ces peuples ne sont pas moins industrieux que les Grecs. Les Sarmates n'ont ni mines de fer, ni moyens de se procurer ce métal, étant de tous les barbares de ces contrées, ceux qui ont le moins de commerce avec les étrangers ; ils y suppléent de la manière suivante. Ils mettent à leurs lances des pointes d'os, leurs arcs sont de bois de cormier, ainsi que leurs flèches qui sont aussi armées d'os. Ils jettent des cordes sur leurs ennemis, et après les avoir enveloppés, ils détournent leurs chevaux, et renversent, en tirant ces cordes, tous ceux qui s'y trouvent pris.
6. Quant à leurs cuirasses, voici comment ils les font : ils nourrissent tous beaucoup de chevaux, ce qui leur est facile, le pays étant possédé en commun et ne produisant que des herbes sauvages, car ce peuple est nomade. Ils se servent de ces chevaux non seulement pour la guerre, mais encore pour leur nourriture, et pour les sacrifices qu'ils font aux divinités du pays. Ils amassent la corne de leurs pieds, la nettoient et la fendent en plaques qu'ils assemblent comme des écailles de serpents ; ceux qui n'ont point vu de serpents, n'ont qu'à se représenter une pomme de pin encore verte, ses écailles peuvent très bien se comparer aux plaques que les Sarmates font avec cette corne ; ils les percent, les cousent les unes aux autres avec des nerfs de chevaux ou de bœufs et en font des cuirasses non moins élégantes ni moins solides que celles des Grecs, car elles résistent également bien aux coups portés de près et aux javelots. » (trad. M. Clavier)
PLUTARQUE
Vie de Lucullus, 26, 6-7. Campagne du proconsul d'Asie Lucullus contre le roi d'Arménie Tigrane II, en 69 av. J.-C.
« 26. [...] Et cette bravade n'était pas si folle, ni si déraisonnable, puisqu'il [Tigrane] voyait à sa suite tant de peuples et de Rois, des phalanges d'hoplites et des dizaines de milliers de cavaliers. Car il menait avec lui vingt mille archers et frondeurs, et cinquante-cinq mille cavaliers, dont dix-sept mille armés de toutes pièces, comme Lucullus l'écrivit au Sénat. » (trad. D. Ricard)
Vie de Lucullus, 28, 1-7.
« 28. Ayant ainsi parlé, il [Lucullus] exhorta les troupes au courage et passa le fleuve. II marchait le premier contre les ennemis, revêtu d'une cuirasse de fer à écailles qui resplendissait, et d'une casaque à franges; quant à son épée, il la faisait voir de là, nue, comme s'il lui fallait aussitôt en venir aux mains avec des hommes qui tiraient de loin et occuper, par la rapidité de sa course, tout l'espace à portée de leurs flèches. Lorsqu'il vit, en bas, la cavalerie cuirassée, dont on parlait beaucoup, rangée sous une éminence dont le sommet était large et uni, et dont la pente, de quatre stades n'offrait ni difficulté d'accès, ni interruption, il donna l'ordre à ses cavaliers thraces et gaulois d'attaquer de flanc et de détourner les piques avec leurs épées. Car la seule arme des cuirassiers est la pique; et ils ne peuvent se servir de rien d'autre pour eux, ni contre leurs ennemis, à cause de la pesanteur et de la dureté de leurs armures; on croirait qu'ils se déplacent avec leurs maisons. Lucullus lui-même, à la tête de deux compagnies, s'acharnait contre l'éminence; et les hommes le suivaient en déployant toute leur vigueur parce qu'ils le voyaient souffrir, tout le premier, les misères du simple fantassin et se démener violemment. Il gravit la colline, et, debout à l'endroit le plus apparent, il cria de toutes ses forces : « Nous sommes victorieux, nous sommes victorieux, camarades ! A ces mots, il les lança contre les cuirassiers, en leur ordonnant de ne plus se servir du javelot, mais d'attaquer à l'arme blanche et de frapper l'ennemi aux mollets et aux cuisses, seules parties qui ne soient pas protégées chez les gens armés de la sorte. On n'eut cependant pas besoin de recourir à cette tactique; car, loin d'attendre le choc des Romains, les cuirassiers prirent, en poussant des clameurs, la plus honteuse des fuites. Ils se jetèrent, avec leurs chevaux pesants, au milieu des armes de leur infanterie, avant qu'elle eût commencé le combat. Ainsi, sans une blessure et sans une goutte de sang, tant de dizaines de milliers d'hommes furent vaincus. Le carnage fut grand parmi ceux qui fuyaient, ou plutôt qui voulaient fuir, car ils ne le pouvaient pas, s'embarrassant eux-mêmes dans la masse compacte de leurs rangs profonds. » (sur la base d'une trad. de D. Ricard)
Vie de Crassus, 18. Des soldats romains à Crassus, qui prépare sa campagne contre les Parthes :
« 18. [...] οἷα δὲ φιλεῖ, πάντα πρὸς τὸ δεινότερον ἐξαγγέλλοντες, ὡς ἄφυκτοι μὲν οἱ ἄνδρες διώκοντες, ἄληπτοι δὲ φεύγοντες, βέλη δὲ πτηνὰ προθέοντα τῆς ὄψεως καί, πρὶν ὀφθῆναι τὸν βάλλοντα, χωροῦντα διὰ τοῦ προστυχόντος, τῶν δὲ καταφράκτων ὅπλων τὰ μὲν διὰ παντὸς ὠθεῖσθαι, τὰ δὲ πρὸς μηδὲν ἐνδιδόναι πεποιημένα. Ταῦτα τῶν στρατιωτῶν ἀκουόντων τὸ θράσος ὑπήρειπε· πεπεισμένοι γὰρ οὐδὲν Ἀρμενίων διαφέρειν Πάρθους οὐδὲ Καππαδοκῶν
« 18. [...] « Les Parthes, disaient-ils, sont des hommes dont on ne peut éviter la poursuite et qu'on ne saurait atteindre dans leur fuite : leurs traits sont d'une espèce inconnue aux Romains, et ils les lancent avec tant de raideur, que l'oeil ne peut eu suivre la rapidité et qu'on en est frappé avant, de les avoir vus partir. Les armes offensives de leur cavalerie brisent et pénètrent tout sans trouver de résistance, et leurs armes défensives ne peuvent être entamées. » Ces rapports rabattirent beaucoup de l’audace des soldats, qui avaient cru que les Parthes ressemblaient aux peuples d'Arménie et de Cappadoce, que Lucullus avait toujours battus et poussés devant lui jusqu'à se lasser. » (trad. D. Ricard)
Vie de Crassus, 19.
19. Οὐχ ἥκιστα δ´ αὐτὸν Ἀρταβάζης ὁ Ἀρμενίων βασιλεὺς ἐπέρρωσεν· ἦλθε γὰρ εἰς τὸ στρατόπεδον μεθ´ ἑξακισχιλίων ἱππέων. Καὶ οὗτοι μὲν ἐλέγοντο φύλακες καὶ προπομποὶ βασιλέως· ἑτέρους δὲ μυρίους ὑπισχνεῖτο καταφράκτους καὶ τρισμυρίους πεζοὺς οἰκοσίτους.
« 19. Ce qui augmenta encore sa confiance, ce fut voir arriver à son camp Artabaze, roi d'Arménie, qui lui amenait six mille cavaliers, qu'on disait n'être que les gardes et les satellites de ce prince, qui lui promettait encore dix mille chevaux bardés de fer et trente mille hommes de pied, tous entretenus à ses dépens. » (trad. D. Ricard)
Vie de Crassus, 21. A propos du Surena.
« 21. [...] Ἐξήλαυνε δὲ καθ´ ἑαυτὸν αἰεὶ χιλίαις σκευοφορούμενος καμήλοις, καὶ διακοσίας ἀπήνας ἐπήγετο παλλακίδων, ἱππεῖς δὲ κατάφρακτοι χίλιοι, πλείονες δὲ τῶν κούφων παρέπεμπον, εἶχε δὲ τοὺς σύμπαντας ἱππεῖς ὁμοῦ πελάτας τε καὶ δούλους μυρίων οὐκ ἀποδέοντας.
« 21. [...] Quand il était en voyage, il avait à sa suite mille chameaux qui portaient son bagage, deux cents chariots pour ses concubines, mille cavaliers tout couverts de fer et un plus grand nombre armés à la légère, car ses vassaux et ses esclaves auraient pu lui composer une escorte de dix mille chevaux. » (trad. D. Ricard)
Vie de Crassus, 24-25. Premiers engagements de Carrhes.
« 24. Ἐκπεπληγμένων δὲ τῶν Ῥωμαίων δέει διὰ τὸν ἦχον, ἐξαίφνης τὰ προκαλύμματα τῶν ὅπλων καταβαλόντες, ὤφθησαν αὐτοί τε φλογοειδεῖς κράνεσι καὶ θώραξι, τοῦ Μαργιανοῦ σιδήρου στίλβοντος ὀξὺ καὶ περιλαμπές, οἵ θ´ ἵπποι καταπεφραγμένοι χαλκοῖς καὶ σιδηροῖς σκεπάσμασι, μέγιστος δ´ ὁ Σουρήνας καὶ κάλλιστος αὐτός, τῇ δὲ κατ´ ἀνδρείαν δόξῃ τὴν θηλύτητα τοῦ κάλλους οὐκ ἐοικώς, ἀλλὰ μηδικώτερον ἐσκευασμένος ἐντρίμμασι προσώπου καὶ κόμης διακρίσει, τῶν ἄλλων Πάρθων ἔτι Σκυθικῶς ἐπὶ τὸ φοβερὸν τῷ ἀνασίλλῳ κομώντων. Πρῶτον μὲν οὖν διενοοῦντο τοῖς κοντοῖς εἰσελαύνοντες ὠθεῖν καὶ βιάζεσθαι τοὺς προτάκτους· ὡς δ´ ἑώρων τό τε βάθος τοῦ συνασπισμοῦ καὶ τῶν ἀνδρῶν τὸ μόνιμον καὶ παρεστηκός, ἀνῆγον ὀπίσω, καὶ σκίδνασθαι δοκοῦντες ἅμα καὶ διαλύειν τὴν τάξιν, ἐλάνθανον ἐν κύκλῳ περιβάλλοντες τὸ πλινθίον αὐτῶν. Κράσσου δὲ τοὺς ψιλοὺς ἐκδραμεῖν κελεύσαντος, οὗτοι μὲν οὐ πολὺ προῆλθον, ἀλλὰ πολλοῖς τοξεύμασιν ἐντυχόντες, ταχὺ συμπαρέντες αὖθις ἐνεδύοντο τοῖς ὁπλίταις, καὶ παρεῖχον ἀκοσμίας ἀρχὴν καὶ δέους ὁρῶσι τὴν ῥύμην τῶν ὀιστῶν καὶ τὸν τόνον, ὅπλα τε ῥηγνύντων καὶ διὰ παντὸς φερομένων ὁμοίως ἀντιτύπου καὶ μαλακοῦ στεγάσματος. Οἱ δὲ Πάρθοι διαστάντες ἐκ μήκους ἤρξαντο τοξεύειν ἅμα πανταχόθεν, οὐ τὴν ἀκριβῆ τοξείαν - ἡ γὰρ συνέχεια καὶ πυκνότης τῶν Ῥωμαίων οὐδὲ τῷ βουλομένῳ διαμαρτάνειν ἀνδρὸς παρεῖχεν - , εὐτόνους δὲ τὰς πληγὰς καὶ βιαίους διδόντες ἀπὸ τόξων κραταιῶν καὶ μεγάλων καὶ τῇ σκολιότητι τῆς καμπῆς τὸ βέλος ἠναγκασμένον ἀποστελλόντων. Ἦν οὖν αὐτόθεν ἤδη μοχθηρὰ τὰ Ῥωμαίων· καὶ γὰρ μένοντες ἐν τάξει συνετιτρώσκοντο, καὶ χωρεῖν ὁμόσε πειρώμενοι, τοῦ μὲν ποιεῖν ἴσον ἀπεῖχον, ὁμοίως δ´ ἔπασχον· ὑπέφευγον γὰρ ἅμα βάλλοντες οἱ Πάρθοι, καὶ τοῦτο κράτιστα ποιοῦσι μετὰ Σκύθας, καὶ σοφώτατόν ἐστιν ἀμυνομένους ἐπὶ τῷ σῴζεσθαι τῆς φυγῆς ἀφαιρεῖν τὸ αἰσχρόν.
25. Ἄχρι μὲν οὖν ἤλπιζον αὐτοὺς ἐκχεαμένους τὰ βέλη σχήσεσθαι μάχης ἢ συνάψειν εἰς χεῖρας, ἐκαρτέρουν· ὡς δ´ ἔγνωσαν ὅτι πολλαὶ κάμηλοι παρεστᾶσι τοξευμάτων πλήρεις, ἀφ´ ὧν περιελαύνοντες οἱ πρῶτοι λαμβάνουσιν, οὐδὲν πέρας ὁρῶν ὁ Κράσσος ἠθύμει, καὶ σκοπεῖν ἐκέλευεν, ἀγγέλους πέμψας πρὸς τὸν υἱόν, ὅπως προσμεῖξαι βιάσαιτο τοῖς ἐναντίοις πρὶν ἢ κυκλωθῆναι· μάλιστα γὰρ ἐκείνῳ προσέκειντο καὶ περιίππευον τὸ κέρας ὡς κατὰ νώτου γενησόμενοι. Λαβὼν οὖν ὁ νεανίας ἱππεῖς τε χιλίους καὶ τριακοσίους, ὧν οἱ χίλιοι παρὰ Καίσαρος ἦσαν, καὶ τοξότας πεντακοσίους καὶ τῶν ἔγγιστα θυρεαφόρων ὀκτὼ σπείρας, συνήγαγεν εἰς ἐμβολήν. Τῶν δὲ Πάρθων οἱ περιελαύνοντες, εἴτε τέλμασιν ἐντυχόντες, ὡς ἔνιοί φασιν, εἴτε λαβεῖν τὸν Κράσσον ἀπωτάτω τοῦ πατρὸς στρατηγοῦντες, ὀπίσω στρέψαντες ἀπεδίωκον. Ὁ δ´ ἐμβοήσας ὡς οὐ μένουσιν οἱ ἄνδρες ἤλαυνε, καὶ σὺν αὐτῷ Κηνσωρῖνός τε καὶ Μεγάβακχος, ὁ μὲν εὐψυχίᾳ καὶ ῥώμῃ διαφέρων, Κηνσωρῖνος δὲ καὶ βουλευτικὸν ἔχων ἀξίωμα καὶ δεινὸς εἰπεῖν, ἑταῖροι δὲ Κράσσου καὶ παραπλήσιοι καθ´ ἡλικίαν. Ἐπισπομένων δὲ τῶν ἱππέων οὐδὲ τὸ πεζὸν ἀπελείπετο προθυμίᾳ καὶ χαρᾷ τῆς ἐλπίδος· νικᾶν γὰρ ᾤοντο καὶ διώκειν, ἄχρι οὗ πολὺ προελθόντες ᾔσθοντο τὴν ἀπάτην, μεταβαλλομένων ἅμα τῶν φεύγειν δοκούντων καὶ πλειόνων ἄλλων ἐπιφερομένων. Ἐνταῦθα δ´ ἔστησαν, οἰόμενοι συνάψειν αὐτοῖς εἰς χεῖρας ὀλίγοις οὖσι τοὺς πολεμίους. Οἱ δὲ τοὺς καταφράκτους προτάξαντες ἐναντίους τοῖς Ῥωμαίοις, τὴν δ´ ἄλλην ἵππον ἄτακτον περὶ αὐτοὺς ἐλαύνοντες καὶ συνταράσσοντες τὸ πεδίον, ἀνίστασαν ἐκ βυθοῦ θῖνας ἄμμου, κονιορτὸν ἐπαγούσας ἄπλετον, ὡς μήτε διορᾶν ῥᾳδίως μήτε φθέγγεσθαι τοὺς Ῥωμαίους, εἱλουμένους δ´ ἐν ὀλίγῳ καὶ συμπίπτοντας ἀλλήλοις, βάλλεσθαι καὶ ἀποθνῄσκειν οὐ ῥᾴδιον οὐδ´ ὀξὺν θάνατον, ἀλλ´ ὑπὸ σπασμοῦ καὶ ὀδύνης δυσανασχετοῦντας καὶ κυλινδουμένους περὶ τοῖς ὀιστοῖς ἐναποθραύειν τοῖς τραύμασι, βίᾳ τε πειρωμένους ἐξέλκειν ἠγκιστρωμένας ἀκίδας καὶ δεδυκυίας διὰ φλεβῶν καὶ νεύρων, προσαναρρηγνύναι καὶ λυμαίνεσθαι σφᾶς αὐτούς. Οὕτω δὲ πολλῶν ἀποθνῃσκόντων, ἄπρακτοι καὶ οἱ ζῶντες ἦσαν πρὸς ἀλκήν, καὶ τοῦ Ποπλίου παρακαλοῦντος ἐμβαλεῖν εἰς τὴν κατάφρακτον, ἐπεδείκνυσαν ἑαυτῶν χεῖράς τε θυρεοῖς προσπεπερονημένας καὶ πόδας διαμπὰξ προσεληλαμένους πρὸς τοὔδαφος, ὥστε καὶ πρὸς φυγὴν ἀμηχάνους εἶναι καὶ πρὸς ἄμυναν. Αὐτὸς οὖν τοὺς ἱππεῖς παρορμήσας, προσέβαλε μὲν ἐρρωμένως καὶ συνῆψε τοῖς ἀνδράσιν, ἦν δ´ ἄνισος ἔν τε ταῖς πληγαῖς καὶ τῷ φυλάσσεσθαι, παίων μὲν ἀσθενέσι καὶ μικροῖς δορατίοις θώρακας ὠμοβύρσους ἢ σιδηροῦς, παιόμενος δὲ κοντοῖς εἰς εὐσταλῆ καὶ γυμνὰ σώματα τῶν Γαλατῶν· τούτοις γὰρ ἐθάρρει μάλιστα, καὶ μετὰ τούτων ἔργα θαυμαστὰ διεπράττετο. Τῶν τε γὰρ κοντῶν ἐπελαμβάνοντο, καὶ συμπλεκόμενοι τοὺς ἄνδρας ἀπὸ τῶν ἵππων ἐώθουν, τῇ βαρύτητι τοῦ ὁπλισμοῦ δυσκινήτους ὄντας, πολλοὶ δὲ τοὺς ἑαυτῶν ἀπολείποντες ἵππους καὶ ὑποδυόμενοι τοῖς ἐκείνων ἔτυπτον εἰς τὰς γαστέρας· οἱ δ´ ἀνεσκίρτων ὑπ´ ὀδύνης, καὶ συμπατοῦντες ἐν ταὐτῷ τοὺς ἐπιβάτας καὶ τοὺς πολεμίους ἀναπεφυρμένους, ἀπέθνῃσκον. Ἐπίεζε δὲ τοὺς Γαλάτας μάλιστα τό τε θάλπος καὶ τὸ δίψος, ἀμφοτέρων ἀήθεις ὄντας, καὶ τῶν ἵππων ἀπολώλεισαν οἱ πλεῖστοι πρὸς ἐναντίους ἐλαυνόμενοι τοὺς κοντούς. Ἐβιάσθησαν οὖν ἀναχωρῆσαι πρὸς τοὺς ὁπλίτας, ἔχοντες τὸν Πόπλιον ὑπὸ τραυμάτων ἤδη κακῶς διακείμενον. ἰδόντες δὲ θῖνα βουνώδη πλησίον, ἐχώρουν ἐπ´ αὐτήν, καὶ τοὺς μὲν ἵππους ἐν μέσῳ κατέδησαν, ἔξωθεν δὲ τοῖς θυρεοῖς συγκλείσαντες, ᾤοντο ῥᾷον ἀμυνεῖσθαι τοὺς βαρβάρους. Ἀπέβαινε δὲ τοὐναντίον· ἐν μὲν γὰρ τῷ ὁμαλῷ τοῖς ὄπισθεν ἁμῶς γέ πως οἱ πρότακτοι παρέχουσι ῥᾳστώνην, ἐκεῖ δ´ ἄλλον ὑπὲρ ἄλλου διὰ τὴν ἀνωμαλίαν ἀνέχοντος τοῦ χωρίου καὶ μᾶλλον ἀεὶ τοὺς κατόπιν ἐξαίροντος, οὐδὲν ἦν τὸ διαφεῦγον, ἀλλ´ ἐβάλλοντο πάντες ὁμαλῶς, ὀδυρόμενοι τὴν ἀκλεῆ καὶ ἄπρακτον αὑτῶν τελευτήν. »
« 24. Les Romains étaient encore tout effrayés de ce bruit extraordinaire, lorsque les Parthes, jetant tout à coup les couvertures de leurs armes, parurent tout en feu par le vif éclat de leurs casques et de leurs cuirasses, qui, faits d'un acier margien, brillaient comme la flamme ; leurs chevaux, bardés de fer et d'airain, ne jetaient pas moins d'éclat. A leur tête, Suréna se faisait distinguer par sa taille et sa beauté ; son air efféminé semblait démentir sa haute réputation ; car il peignait son visage à la façon des Mèdes, et ses cheveux étaient séparés sur le front ; au lieu que les autres Parthes les laissaient croître naturellement, à la manière des Scythes, afin de se rendre plus terribles. Ils voulurent d'abord charger les Romains, à coups de pique, afin de les enfoncer et d'ouvrir leurs premiers rangs ; mais quand ils eurent reconnu la profondeur de leur phalange et l'assiette ferme des soldats qui se tenaient unis et serrés, ils reculèrent à quelque distance, et, feignant de se disperser et de rompre leur ordonnance, ils eurent enveloppé le bataillon carré des Romains avant que ceux-ci se fussent aperçus de leur dessein. Crassus, aussitôt, ordonne à ses troupes légères de tomber sur l'ennemi ; mais elles n'allèrent pas loin : accablées d'une grêle de flèches, elles se retirèrent bien vite pour se mettre à couvert sous leur infanterie, qui commença à être saisie de trouble et d'effroi à la vue de ces flèches, dont la force et la raideur brisaient toutes les armes et ne trouvaient aucune résistance. Les Parthes, s'étant éloignés, lancèrent des flèches de tous côtés sans viser personne, la phalange romaine était si serrée, qu'il était impossible que chaque coup ne portât pas, et tous ces coups étaient terribles ; la grandeur, la force, la flexibilité de leurs arcs, donnaient plus d'étendue à la corde, chassaient la flèche avec impétuosité, et faisaient des blessures profondes. Les Romains étaient dans la situation la plus fâcheuse : s'ils restaient fermes dans leurs rangs, ils étaient cruellement blessés ; s'ils marchaient contre les ennemis ils ne pouvaient leur faire de mal, et n'en étaient pas moins maltraités. Les Parthes fuyaient à leur approche, sans cesser pour cela de tirer ; car c'est une manière de combattre qu'ils entendent mieux qu'aucun autre peuple du monde, après les Scythes : manoeuvre très adroitement imaginée, puisqu'ils se défendaient même en fuyant et que par là leur fuite n'a rien de honteux.
25. Tant que les Romains espérèrent que les Parthes, après avoir épuisé leurs flèches, cesseraient de combattre ou en viendraient aux mains, ils souffrirent avec courage ; mais quand on sut qu'il y avait derrière l'armée des chameaux chargés de flèches, où les premiers rangs, en faisant le tour, allaient, à mesure qu'ils en avaient besoin, en prendre de nouvelles, alors Crassus, ne voyant pas de terme à des maux si cruels, fit dire à son fils de tout tenter pour joindre et charger les ennemis avant qu'il fût enveloppé ; car c'était surtout de son corps de cavalerie qu'une des ailes de l'armée ennemie s'était approchée davantage, pour l'entourer et la prendre par derrière. Le jeune Crassus, ayant pris à l'instant treize cents chevaux, au nombre desquels étaient les mille que César lui avait donnés, cinq cents archers, et les huit cohortes d'infanterie qui se trouvaient le plus prés de lui, courut sur ceux des ennemis qui cherchaient à l'envelopper ; mais les Parthes, soit comme on l'a dit, qu'ils craignissent cette attaque, soit qu'ils voulussent attirer le jeune homme le plus loin qu'ils pourraient de son père, tournèrent bride et prirent la fuite. Le fils de Crassus se mit à crier que les ennemis n'osaient les attendre ; et en même temps il pousse à eux à bride abattue, suivi de Censorinus et de Mégabacchus ; celui-ci, distingué par son courage et par sa force ; Censorinus, par sa dignité de sénateur et par son éloquence ; tous deux amis du jeune Crassus et à peu près de son âge. La cavalerie s'étant donc mise à la poursuite de l’ennemi, l’infanterie ne voulut pas montrer moins d'ardeur ni moins de joie, dans l'espérance qu'ils avaient de la victoire ; car ils croyaient être vainqueurs, et n'avoir plus qu'à poursuivre l'ennemi. Mais lorsqu'ils furent très éloignés du corps de leur armée, ils reconnurent la fraude des Parthes ; ceux qui avaient fait semblant de fuir tournèrent la tête, et fureur bientôt rejoints par un grand nombre d'autres. Les Romains s'arrêtèrent, dans la pensée que les ennemis, les voyant en si petit nombre, en viendraient aux mains avec eux ; mais les Parthes, leur opposant leurs chevaux bardés de fer, firent voltiger autour d'eux leur cavalerie légère, qui, en courant la plaine et en remuant jusqu'au fond les monceaux de sable dont elle était couverte, éleva un nuage de poussière si épais, que les Romains ne pouvaient ni se voir ni se parler. Rassemblés dans un petit espace, et pressés les uns contre les autres, ils tombaient sous les flèches des ennemis, et expiraient d'une mort aussi lente que cruelle, dans des douleurs et des déchirements insupportables. Ils se roulaient sur le sable avec les flèches dans le corps et mouraient dans des tourments affreux ; ou, s'ils voulaient arracher ces flèches à pointes recourbées, qui avaient pénétré à travers les veines et les nerfs, ils ouvraient davantage leurs plaies, et augmentaient leurs douleurs.Il en périt un grand nombre dans cette attaque meurtrière, et ceux qui restaient encore n'étaient plus en état de se défendre. Le jeune Crassus les ayant exhortés à charger cette cavalerie bardée de fer, ils lui montrèrent leurs mains attachées à leurs boucliers, leurs pieds percés d'outre en outre et cloués à terre, en sorte qu’ils étaient dans une égale impuissance de combattre et de fuir. Alors Crassus, poussant ses cavaliers, se jette au milieu des ennemis, et les charge avec vigueur, mais le combat était trop inégal ; soit dans l'attaque, soit dans la défense. Les Romains frappaient avec des javelines faibles et courtes, sur des cuirasses d'acier ou de cuir ; et les barbares, armés de forts épieux, portaient des coups terribles sur les corps des Gaulois qui étaient presque nus ou légèrement armés. C'était en ces derniers que le jeune Crassus avait la plus grande confiance, et il fit avec eux des prodiges de valeur. Ils prenaient à pleines mains les épieux des Parthes, et, les saisissant eux-mêmes parle milieu du corps, ils les renversaient de dessus leurs chevaux, et une fois à terre, la pesanteur de leurs armes les empêchait de se relever. Plusieurs de ces cavaliers gaulois, quittant leurs chevaux, se glissaient sous ceux des ennemis, et leur perçaient le flanc avec leurs épées. Ces animaux se cabraient de douleur, renversaient leurs maîtres, les foulaient aux pieds pèle-mêle avec les ennemis, et tombaient morts sur la place : mais rien ne faisait autant souffrir les Gaulois que la chaleur et la soif, qu'ils n'étaient pas accoutumés à supporter. Plusieurs de leurs chevaux périrent en allant s'enferrer d'eux-mêmes dans les épieux des ennemis. Ils furent donc obligés de se retirer vers leur infanterie, emmenant le jeune Crassus, qui souffrait beaucoup de ses blessures. Ayant aperçu assez près d'eux une butte de sable, ils s'y retirèrent, attachèrent leurs chevaux au milieu de cet espace, et formèrent une sorte d'enceinte avec leurs boucliers, dans l’espérance qu'ils pourraient mieux s'y défendre contre les barbares. Il arriva tout le contraire ; car, sur un terrain uni, les premiers rangs servent à couvrir les derniers ; mais l’inégalité du lieu les élevant les uns au-dessus des autres, et ceux de derrière étant les plus découverts, ils ne pouvaient éviter les flèches des ennemis, ils en étaient tous également frappés, et déploraient leur malheur de périr ainsi sans gloire et sans pouvoir se venger. » (trad. D. Ricard)
Vie de Crassus, 27. Nouvel engagement à la suite de la défaite du fils de Crassus.
« 27. Τοιαῦτα λέγων καὶ παραθαρσύνων ὁ Κράσσος οὐ πολλοὺς ἑώρα προθύμως ὑπακούοντας, ἀλλὰ καὶ συναλαλάξαι κελεύσας ἤλεγξε τοῦ στρατοῦ τὴν κατήφειαν, ἀσθενῆ καὶ ὀλίγην καὶ ἀνώμαλον κραυγὴν ποιήσαντος· ἡ δὲ παρὰ τῶν βαρβάρων λαμπρὰ καὶ θρασεῖα κατεῖχε. Τραπομένων δὲ πρὸς ἔργον, οἱ μὲν ἱππόται πλάγιοι περιελαύνοντες ἐτόξευον, αὐτοὶ δὲ τοῖς κοντοῖς οἱ πρότακτοι χρώμενοι, συνέστελλον εἰς ὀλίγον τοὺς Ῥωμαίους, πλὴν ὅσοι τὸν ὑπὸ τῶν τοξευμάτων φεύγοντες θάνατον ἀπετόλμων παραβόλως εἰς αὐτοὺς φέρεσθαι, μικρὰ μὲν βλάπτοντες, ὀξέως δὲ θνῄσκοντες ὑπὸ τραυμάτων μεγάλων καὶ καιρίων, παχὺν ἐπωθούντων τῷ σιδήρῳ τὸν κοντόν, τοὺς ἵππους, πολλάκις δὲ καὶ διὰ δυοῖν ἀνδρῶν ὑπὸ ῥύμης διαπορευόμενον. »
« 27. Dès que l'attaque eut commencé, la cavalerie légère des Parthes se répandit sur les flancs des Romains et fit pleuvoir sur eux une grêle de flèches. La cavalerie pesamment armée, les chargeant de front avec ses épieux, les força de se resserrer dans un espace étroit ; quelques-uns seulement, pour éviter la mort cruelle que donnaient les flèches, osèrent se jeter sur eux en désespérés, non qu'ils leur fissent beaucoup de mal ; mais du moins ils recevaient une mort prompte des blessures larges et profondes que faisaient ces longues piques, dont les barbares leur portaient des coups si raides et si forts que souvent ils perçaient deux cavaliers à la fois. Un combat si inégal dura jusqu'à la nuit, qui obligea les Parthes de rentrer dans leur camp. » (trad. D. Ricard)
Œuvres morales, Titus Quinctius, 4 (=197C).
4. Le roi Antiochos étant arrivé en Grèce avec des forces nombreuses, et l’effroi étant général devant tous ces corps de troupes et leur armement, il [Titus Quinctius] tint devant les Achéens le discours suivant : il leur dit que, dînant un jour à Khalkis chez un hôte, il s’était étonné de la quantité des viandes ; l’hôte avait répondu que tout cela n’était que du cochon, assaisonné et apprêté de différentes manières. « Ne soyez donc pas étonnés, vous non plus, des forces du roi, dit-il, parce qu’on vous parle de « lanciers » (logxophoroi), de « cuirassiers » (kataphraktoi), de « gardes à pied » et d’ « archers à cheval avec cheval de rechange » ; tous ces gens-là ne sont que des Syriens, qui diffèrent seulement les uns des autres par leurs armes de pacotille ».
Œuvres morales, Lucullus, 1-2 (=203A-B).
« 1. Lucullus, en Arménie, marchait avec dix mille fantassins lourds et mille cavaliers contre Tigrane, qui avait une armée de cent cinquante mille hommes, la veilles des nones d’octobre, jour où les forces de Caepio avaient été détruites, dans le passé, par les Cimbres. Quelqu’un ayant fait remarquer que les Romains redoutaient cet anniversaire et le considéraient comme néfaste, « Eh bien, dit-il, mettons aujourd’hui tout notre cœur à la lutte, afin de faire également de ce jour de malédiction et de tristesse un jour de gaieté et de bonheur pour Rome ». 2. Les soldats redoutant au plus haut point les cavaliers cuirassés (kataphraktoi), il les exhorta à avoir confiance : la tâche était plus dure de dépouiller ces gens-là que de les vaincre. Puis, ayant marché le premier vers la colline, il cria, après avoir contemplé l’agitation des barbares : « Victoire camarades ! » ; et, sans rencontrer aucune résistance, il ne perdit, dans la poursuite, que cinq des Romains, qui tombèrent, mais tua plus de cent mille des ennemis. »
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