Il semblerait, d'après mes pérégrinations que les attaques contre le luxe alimentaire à l'époque tardive viennent du fort impact du stoïcisme sur les milieux aisés. Prônant l'ascétisme et la modération, bien en lien avec les vieilles valeurs traditionnelles de la Rome des origines, ces critiques visent les pratiques culinaires des riches romains. Il existe certes une stigmatisation vis à vis de ce phénomène, mais qui se base néanmoins sur certaines réalités.
Ainsi, Mamertin (Claude) dans son panégyrique à Julien dénonce les frasques alimentaires de la cour :
« Bien plus, la chose publique se ressentait de la munificence savante de ses déjeuners et de ses dîners, car les mets les plus recherchés n'étaient point prisés pour leur saveur, mais pour leur rareté, oiseaux merveilleux, poissons des mers lointaines, fruits servis hors de leur saison, neiges estivales, roses d'hiver », Quin etiam prandiorum atque cenarum laboratas magnitudines res publica sentiebat, cum quaesitissimae dapes non gustu, sed difficultatibus aestimarentur, miracula avium, longinqui maris pisces, alieni temporis poma, aestiva nives, hibernae rosae. (Panégyriques latin, tome III, XI, 11).
On ressent ici une sorte de compétition dans la démesure des repas, servant à impressionner l'hôte, ce qui concorde avec une critique acerbe d'Ammien Marcellin contre ces mêmes riches :
« D'autres mettent leur point d'honneur dans la possession de voitures plus hautes qu'il n'est d'usage et dans la somptueuse parure de leurs vêtements ; ils transpirent sous le poids des manteaux qu'ils enfilent à leur cou, et attachent à leur gorge : ces manteaux étant sensibles au moindre souffle en raison de la minceur extrême du tissu, ils les déploient par des mouvements rapides, surtout de la main gauche, afin d'en faire chatoyer en transparence les franges les plus longues ainsi que leurs tuniques, où des broderies multicolores représentent des figures d'animaux de toutes sortes », Alii summum decus in carruchis solito altioribus et ambitioso uestium cultu ponentes sudant sub ponderibus lacernarum, quas in collis insertas cingulis ipsis adnectunt nimia subtegminum tenuitate perflabiles, expandentes eas crebris agitationibus maximeque sinistra, ut longiores fimbriae tunicaeque perspicue luceant uarietate liciorum effigiatae in species animalium multiformes. (Amm. XIV, 6, 9).
On peut donc sans doute y voir une recherche du paraitre, un comportement agonistique au sein d'une élite fortunée, se traduisant par la démonstration de cette richesse de manière ostentatoire à travers la cuisine et le vêtement.
_________________ Scribant reliqua potiores, aetate doctrinisque florentes. quos id, si libuerit, adgressuros, procudere linguas ad maiores moneo stilos. Amm. XXXI, 16, 9.
|