Tout juste sorti pour le moi d'Avril-Mai 2011, le Numéro 39 du magasine Champs de Bataille consacre un article conséquent de 14 pages à la célèbre bataille de Strasbourg opposant les troupes de l'empereur Julien (360-363) encore simple César en Occident à celles des Alamans en 357 de notre ère.
Les "Herculiani" largement sollicités avec leurs amis des associations "Foederati" et "Ordali" par son auteur Stephane Moronval pour illustrer le texte, l'article était pour nous une nouvelle occasion de diffuser notre travail de reconstitution et "l'image" la plus exacte possible des soldats, des équipements, et des modes de combats des armées romaines de l'époque tardive.
Après quelques échanges téléphoniques et éléctroniques forts sympathiques, nous avons convenu une série de photos axé sur le collectif et les formations de groupe de l'infanterie romaine de manière à capter au mieux les spécificités de celles-ci dans le cadre de la bataille de Strasbourg. En sus, un ou deux portraits d'officiers romains de l'époque avec un clin d'oeil au traité du "DE REBUS BELLICIS" qui n'aura pas échappé au connaisseur.
Je dois avouer que les rapports avec l'auteur ont été excellent et celui-ci profondément motivé par la perspective d'écrire sur l'histoire militaire de cette époque encore peu connue. Au cours de nos échanges, nous avons pu débattre briévement de la bataille et de la tactique employée par les romains du IVe siècle. Stephane Moronval envisageant de persévérer dans la période par l'écriture d'un article sur le siège d'Amida ou encore sur les campagnes Perses du même empereur Julien ce que je ne peux qu'encourager en l'assurant du concours de l'association des "Herculiani".
La passion et le vif intérêt de l'auteur pour cette bataille et la période se fait sentir dès les premières lignes de l'article. Le texte pour un magasine de vulgarisation n'en est pas moins un texte de fond qui bien que synthétisant forcément au mieux la complexité de la période et des conditions de la bataille pose un contexte militaire et historique le plus exhaustif possible et ne démérite pas dans la lignée de ce qui peut être écrit par Catherine Wolff pour "La campagne de Julien en Perse" dans la collection Illustoria aux Editions Maison.
Ainsi donc, l'auteur évite les simplismes et n'ômet pas par exemple de citer l'échec de la deuxième armée de campagne de 25000 hommes commandée par Barbatio censer prendre en tenaille les forces Alamaniques en pleine concentration d'après le plan initial élaboré par Julien et son Etat-Major... A l'inverse combien d'auteurs résumeraient la rencontre entre romains et Alamans par un laconique "Julien ne put rassembler que 13000 hommes pour la bataille..." pour mettre en exergue la faiblesse supposée des effectifs lors des batailles rangées de l'époque. Poncif du genre réccurent et qui ne résiste pourtant pas à l'analyse.
Analyse justement qui sonne juste de la part de Stephane Moronval et qui dépasse largement la simple relecture de nos éminents spécialistes que sont Yann Le Bohec ou Philippe Richardot fort justement cités dans la biblio de l'auteur. Dans cet article c'est encore Ammien Marcellin qui est la référence de première main par le crible du Chapitre 12 de son livre XVI. Stephane Moronval nous offre donc avant tout sa lecture de la bataille de Strasbourg avant celle des autres et c'est certainement ce qu'il y a de plus agréable à la lecture de ses pages.
Quelques allusions bienvenues aux modes de combats collectifs mais aussi individuels figurent dans l'article bien qu'il aurait pu être dit aussi que l'infanterie lourde disposait autant de type d'armes de jets que l'infanterie légère à l'approche du combat au corps à corps. De même, la mention de l'Hasta comme arme de contact prééminente aurait pu apparaitre plus nuancée. Toutefois l'essentiel des différentes phases de la bataille sont là et illustrées d'excellente manière par toute une série de cartes et de shémas tout à fait maitrisés.
On regrettera en revanche une erreur grossière qui ne peut être imputée à l'auteur mais sans doute à l'éditeur pour combler un vide possible dans la maquette de l'article par l'introduction pleine page d'une illustration de légionnaire des guerre Daciques de Trajan (début du IIe siècle) pour figurer un fantassin lourd du IVe siècle (SIC!). Erreur d'autant plus dommageable qu'elle ne passe pas inaperçue et pourrait décrédibiliser le travail littéraire de l'auteur ce qu'il ne mérite nullement.
Enfin l'auteur conclu pour achever son article sur la fin de l'empire Romain en Occident avec la sac de Rome qui s'avère un raccourci temporel qui, si il est évocateur pour le lecteur n'en reste pas moins un peu en décalage avec la finesse de l'exposé. Toutefois nous comprenons la fonction de ce "passage obligé" et au final, l'article est largement à conseiller à la lecture pour qui s'intéresserait à l'histoire militaire de l'Antiquité Tardive. En somme, une très bonne vulgarisation.