J'avais déjà il me semble évoqué ce site par le passé mais je permet de ré-attirer l'attention à son propos.
Le site de Llandough est celui d'un ancien monastère et de son cimetière, au Pays de Galles dans le Glamorgan, non loin de Cardiff. On y trouve actuellement une église dédiée à Saint Dochdwy dont l'essentiel date seulement du XIXe siècle. Le site a fait l'objet de plusieurs campagnes de fouilles. Les premières ont permit de retrouver un cimetière de l'âge du fer et une villa romaine. La dernière campagne en 1994 a mit en évidence un cimetière datant du Haut Moyen Age, à proximité de la villa romaine. Un établissement monastique est connu à cet emplacement d'après plusieurs sources, notamment les chartes de Llandaff. Sa fondation est attribuée à Saint Dochdwy. Les résultats des fouilles ont fait l'objet de publications en 2005 dans la revue
Medieval Archaeology.
Si l'on se fie aux Annales d'Ulster, Dochdwy (ou Doccus ou Docgwin), évêque et abbé (
Quies Docci episcopi sancti Britonum
abbatis) serait mort en 473. Le site semble délaissé au profit de Llandaff au XIe siècle. Les éléments de datation coincident d'ailleurs avec ces tombes : mobilier céramique d'origine méditerranéenne datés des fin V-début VIe siècles pour les plus anciennes, datations carbone 14, et mobilier métallique des X-XIe siècles pour les dernières.
Seul le cimetière alto-médiéval a été mis à jour. L'église du monastère se trouvant probablement sous la chapelle actuelle.
De la villa au monastèreCe qui devint le petit royaume de Glywysing puis de Glamorgan au Haut Moyen Age, tout près de Cardiff, faisait à l'époque romaine partie de la
civitas des Silures. C'est au contraire du reste du Pays de Galles une zone assez romanisée, comptant un certain nombre de
villae, et plusieurs agglomérations importantes. La villa a été occupée au moins jusqu'à la fin du IVe siècle (après quoi on manque de matériaux diagnostiques). On peut se poser la question d'une continuité entre cette villa, et le monastère, attesté à partir de la fin du Ve siècle. Cette hypothèse est intéressante quant à expliquer les origines du monastère. On se retrouverait ainsi face à un cas de figure similaire à certaines fondations monastiques en Gaule. La fondation aurait ainsi pu succéder à une chapelle dans la
villa. C'est en tout cas l'une des explications possibles. Les ruines de la villa ont également pu attirer l'implantation de la fondation. Enfin on peut penser au don du domaine par un chef laïque.
Pouvoir temporel et pouvoir spirituelUn autre intérêt du site est la proximité de la forteresse de Dinas Powys. Cet habitat d'élite fut fouillé en presque intégralité par Leslie Alcock dans les années 50, et fut occupé à la même période que Llandough. On y a d'ailleurs retrouvé de nombreux débris de céramiques et verres importés des V-VIIe siècles. Dinas Powys était sans doute la résidence, ou l'une des résidences, du roitelet ou du potentat local, avec les artisans sous sa protection (travail des métaux et du cuir), le hall et ses banquets. On ne peut qu'établir une relation entre les deux sites. Llandough était très probablement sous la protection du seigneur de Dinas Powys, dont l'autorité s'étendait peut être sur le cantref de Penychen, voire tout le Glywysing ? Cette forteresse était bien moins imposante que les occupations contemporaines de Tintagel ou de South Cadbury, mais à une échelle plus proche on a dans le Sud du Pays de Galles des sites comme Coygan Camp, Hen Gastell ou Longbury Banks. Les denrées exotiques importées (vin, huile et vaisselle) étaient redistribuées en partie vers le monastère de Llandough. On peut peut être suggérer que ce fut le potentat de Dinas Powys qui confia le domaine de Llandough à Doccus, à la fin du Ve siècle.
De telles relations sont en tout cas très intéressantes à mettre en évidence. Ce n'est probablement pas le seul site où on peut relier un habitat d'élite et une fondation monastique dans la région.
Les occupants du cimetièreA l'heure actuelle, les 1026 inhumations du cimetière de Llandough constituent l'échantillon le plus large pour la période considérée au Pays de Galles. La datation des tombes s'étale entre la fin du Ve et le XIe siècle. Le bon état de conservation des ossements a permis d'intéressantes analyses paléopathologiques. On retrouve environ 30% d'ossements identifiables d'hommes adultes, 25% de femmes adultes et 26% d'individus âgés de moins de 18 ans. La prédominance du sexe masculin s'explique peut être par le caractère monastique du cimetière. La taille des individus adultes s'étalait entre 1m57 à 1m87 pour les hommes, et 1m45 à 1m69 pour les femmes. On a plusieurs cas de goutte parmi les occupants du cimetière, et peu de signes de malnutrition chronique sur les ossements. Le mariage chez les moines fut assez longtemps toléré par le christianisme insulaire, on est ici face à une communauté monastique vivant avec femmes et enfants. En comparaison d'autres populations contemporaines, les occupants de Llandough avaient probablement de meilleures conditions de vie et d'alimentation. Les hommes - au contraire de la population féminine - se semblent pas être tous d'origine autochtone. Peut être faut il y voir des membres de l'élite, bénéficiant d'une meilleure alimentation depuis l'enfance, entrés au monastère.
A noter dans le rare mobilier funéraire des bandes métalliques (avec fragments de lin fossilisés) pouvant correspondre à un objet de pénitence ou à une ceinture herniaire.
Il y aurait bien d'autres choses à dire sur le cimetière, je n'ai voulu faire que reprendre quelques conclusions des deux articles.
Désolé par avance pour les lacunes de ce résumé !
Références :
Neil holbrook and Alan Thomas, "An Early-medieval Monastic Cemetery at Llandough, Glamorgan: Excavations in 1994",
Medieval Archaeology, vol. 49, 2005 -
http://ads.ahds.ac.uk/catalogue/adsdata ... 01_092.pdfJeremy K. Knight, "From Villa to Monastery: Llandough in Context",
Medieval Archaeology, vol. 49, 2005 -
http://ads.ahds.ac.uk/catalogue/adsdata ... 93_107.pdf