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 Sujet du message: Plou ou plebs, guic et vicus
Nouveau messagePublié: 04 Mar 2010, 02:30 
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Morcant a écrit:
On pourrait également étendre la discussion au vaste sujet des guic/vicus et pou/plebs, et sur leurs fondateurs. La vulgate veut qu'il s'agisse d'établissements patronnés par un "saint", un ecclésiastique insulaire. Soazick Kerneis a proposé qu'il s'agissait de colonies à vocation militaire, quelque peu similaire aux établissements des lètes germaniques ou des gentiles barbares dans l'empire. On a aussi proposé il me semble que les "fondateurs" ont très bien pu être des laïcs, "sanctifiés" par les générations ultérieures.

J'aborde là deux thèmes très étendus, j'espère que mon propos n'est pas trop confus à cette heure tardive. Je propose de leur consacrer éventuellement un sujet (ou deux) distinct(s) de ce dernier à fin de permettre des développements plus aisés.


Il y a énormément à dire sur ce sujet, ne serait ce que parmi les nombreux travaux de Léon Fleuriot, Bernard Tanguy et d'autres. Je propose les pistes de réflexion suivantes :
- l'origine de ces établissements
- la chronologie de leur création
- leur relation avec les installations bretonnes sur le continent.

_________________
"O niurt Ambrois ri Frangc ocus Brethan Letha."
"Par la force d'Ambrosius roi des Francs et des Bretons d'Armorique."
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 Sujet du message: Re: Plou ou plebs, guic et vicus
Nouveau messagePublié: 04 Mar 2010, 19:29 
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Inscrit le: 09 Nov 2008, 10:52
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Bonsoir Benjamin,

La "vulgate" à laquelle vous faites allusion est celle de l'école "bretoniste" classique, encore lourdement lestée du poids historiographique de La Borderie naguère dénoncé par le regretté H. Guillotel.

Parmi les autres auteurs qui ont assez récemment traité de ces questions, je rajouterai les noms de Gildas Bernier et d'Erwan Vallerie dans leur thèse de doctorat respective. Sans parler d'études plus ciblées, notamment celles de Louis Pape.

A propos de l'origine des plo(u)e, notons que cette organisation territoriale ne s'observe pas en Bretagne insulaire, non plus que sur le continent là où les Bretons se sont installés en dehors de la péninsule armoricaine.

Bien cordialement,

_________________
André-Yves Bourgès
www.hagio-historiographie-medievale.org


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 Sujet du message: Re: Plou ou plebs, guic et vicus
Nouveau messagePublié: 13 Mar 2010, 20:14 
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Inscrit le: 09 Nov 2008, 10:52
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Bonsoir,

Pour faire la transition entre ce fil de discussion et celui consacré aux pagi bretons continentaux, je souhaitais attirer l'attention sur certaines plo(u)e dont le nom pourrait avoir été formé avec celui du pagus où elles sont situées : je pense en particulier à Plélo, en Goëlo (cf. également dans la même paroisse, le toponyme Château-Goëlo : en ce lieu furent exhumés au XIXe siècle d'assez nombreux vestiges qualifiés de "romains" par leurs inventeurs ; à partir du début du XIIIe siècle, Château-Goëllo est un fief tenu par la famille de Mordelles, à laquelle il était venu par le mariage de l'héritière du lieu, Havoise, avec Olivier de Mordelles).

Donc, en résumant, un très ancien et pérenne centre de commandement, celui du pagus Velaviensis, situé sur le territoire d'une plo(u)e, Plélo (Ploilou, Pleilou, Plelou, Ploelou,au XIIIe siècle) dont le déterminant rappelle incontestablement les formes anciennes du nom du Goëlo (Goilou, Goelou).

Cordialement.

_________________
André-Yves Bourgès
www.hagio-historiographie-medievale.org


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 Sujet du message: Re: Plou ou plebs, guic et vicus
Nouveau messagePublié: 03 Mar 2011, 00:49 
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Inscrit le: 03 Mar 2010, 00:53
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Puisque j'ai du temps devant moi je me permets de déterrer ce sujet afin d'exposer brièvement la critique des théories des plou que j'avais promis :

Partons d'abord d'un constat : Face au manque d’informations écrites et matérielles, les historiens ont pris l’habitude de réfléchir à la question de la mise en place du réseau écclésial breton essentiellement à partir des indications apportées par la toponymie. Tout le monde s’accorde en effet à voir dans les paroisses nommées plou les premières églises de la basse Bretagne.

Ce terme breton est un emprunt au latin plebs sur lequel on a beaucoup disserté. Celui-ci « du sens initial de citoyens non nobles, peuple, servit en latin ecclésiastique à nommer dès le IIIe siècle, la communauté des fidèles par opposition à l’ordo, c'est-à-dire les clercs » (B. Tanguy) , est venu à désigner par la suite l’église paroissiale puis le ressort qui en dépend (M. Lauwers) . Pour résumer à grands traits l’état actuel du débat nous pouvons dire que deux grandes théories s’affrontent :

- La première a été énoncée par R. Largillière :

Selon cet auteur, « les plou sont nés des efforts des missionnaires venus de Grande-Bretagne en partie du pays de Galles pour réévangéliser les populations bretonnes arrivées en désordre dans l’Armorique. Ce clergé, afin d’assurer le culte dans les meilleures conditions, groupa les fidèles en communautés dans le cadre d’unités géographiques faciles à parcourir. Chacun de ces missionnaires, considéré comme un saint, devint l’éponyme de la paroisse qu’il avait établie » (A. Chédeville).

- La seconde thèse est celle de S. Kerneis:

Pour ce chercheur la plou est au départ circonscription publique et religieuse crée par l’administration impériale à la fin de l’Antiquité afin d’encadrer les groupes tribaux nouvellement installés et de lutter contre la résurgence du paganisme. Leurs gestions auraient été confiées à des principes, dont les machtierns du IXe siècle seraient les descendants . Cette vision découle directement des vues de R. Largillière puisqu’elle envisage tous les plou comme des créations anciennes mais à la différence de cet auteur S. Kerneis considère ces dernières comme des institutions romaines et non comme l’œuvre des émigrés bretons. On pourrait dire de cette théorie qu’elle réactualise la thèse de Largillière en tenant en compte l’idée, exposée par N. Chadwick et L. Fleuriot, d’une immigration bretonne organisée par les Romains, ainsi que de la comparaison, proposée par G. Bernier, entre les paroisses primitives de la péninsule et les pievi italiens .

Au regard des travaux les plus récents menées sur les paroisses, ces conceptions posent de nombreux problèmes. On ne peut que s’interroger sur l’idée de ploue au ressort strictement délimité puisque nombre d’études ont montré que les gens du haut Moyen Age ne concevaient pas l’espace un comme un territoire clairement déterminé . Les méthodes proposées pour restituer les ressorts supposés de ces églises n’ont pas davantage de bases scientifiques que celles employées dans le reste de la Gaule . La cartographie des paroisses du début de la période médiévale doit être abandonnée (du moins sous sa forme classique) .

De façon plus générale on ne peut qu’être surpris par le systématisme de ces théories. L’une défend l’idée d’un « tout breton » et l’autre d’un « tout romain » ce qui conduit à lier la majeure partie des créations à des événements particuliers (l’émigration bretonne ou l’encadrement de ce mouvement de population par les Romains) et donc à considérer que la majorité des premiers sanctuaires ont été mis en place dans un laps de temps relativement court. Le contraste avec les autres régions de Gaule, où le réseau des églises s’est construit progressivement paraît trop grand.

Les bases documentaires sur lesquelles reposent ces théories sont en outre assez faibles et contrairement à ce que laisse entendre les deux modèles d’interprétation il est difficile de situer l’époque de la création des plou. Selon N.-Y. Tonnerre, le mot parochia l’emporte définitivement sur plebs au XIIe siècle dans les sources diplomatiques bretonnes . Nous pouvons sans doute placer là un très vague terminus a quo en supposant que le terme plou s’est cristallisé dans la toponymie avant cette période puisqu’il dérive de plebs . Faute d’autre certitude, on peut donc imaginer des créations de plou à la fin de la période haut-médiévale ou au Moyen Age central. L’abandon fréquent du culte et même l’oubli des personnages auxquels beaucoup de ces paroisses étaient vouées incite néanmoins à croire que la majeure partie de ces centres sont plus anciens, mais comment les dater précisément ?

En résumé il nous semble que les interprétations habituellement présentées sur les paroisses anciennes sont à revoir. Faute de données sûres, il paraît présomptueux de vouloir proposer un schéma explicatif d’ensemble. Nous ne savons rien des plou avant le IXe siècle et il ne faut pas oublier qu’il existait au haut Moyen Age d’autres paroisses que celles dont le nom a été forgé à partir de la racine plebs


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