Voilà, je suis de retour après un silence que j'aurais préféré plus court. Mais, entre les prestations et les impératifs de ma production, il fallait définir des priorités...
Le titre quelque est peu trompeur, je vous l'accorde, mais qui n'est pas totalement éloigné de la réalité.
C'était le 4 août dernier. Grand jour puisque deux cuissons simultanées étaient au programme!
Première et très importante dans le cadre de mes recherches, une cuisson expérimentale dans un four du Haut moyen-âge, une installation assez rustique qui a fait merveille, tant elle est puissante, rapide et équilibrée.
Je ne m'étendrai pas plus sur cette fournée que j'ai sommairement décrite, ainsi que la construction qui l'a précédée dans un article sur le forum du Collectif Francs. Vous la trouverez ici:
http://collectif.francs.free.fr/forum/v ... f=20&t=820Celles et ceux qui souhaitent en savoir un peu plus peuvent évidemment suivre les liens vers mon blog qui en dit un peu plus. Vous les trouverez en bas de page en ce qui concerne cette fournée. et sur l'autre forum pour la partie mérovingienne.
Ce four, d'inspiration mérovingienne donc, jouxte une autre installation que vous connaissez déjà peut-être par la lecture d'articles précédents illustrant quelques unes des fournées que j'y ai réalisées.
A droite, vous y voyez le four mérovingien, sans coupole, et donc fonctionnant sous couverture de tessons, et à gauche une vielle connaissance, le four à demi-coupole réalisé en 2007, qui m'a déjà rendu bien de bons et loyaux services.
Le but de cette fournée était la cuisson d'une assez grosse quantité de pièces, essentiellement tardives mais aussi des IIème et IIIème siècles. Leur point commun est des toutes appartenir à la classe des céramiques à revêtement argileux, qui nécessitent toutes une température de cuisson plus ou moins équivalentes.
Le four est ici chargé presque à son maximum. une bonne centaine de pièces, cruches coupes bols et assiettes, mais aussi de nombreux gobelets qui combleront les espaces vides susceptibles de former des puits de tirage.
la mise à feu ds fours est décalée en raison des durées de cuisson très inégales. ä 13 heures, nous démarrons la cuisson gallo-romaine qui doit durer environ 12 heures...
et à 16 heures c'est au tour du four mérovingien que l'on voit ici. Les foyers de ces fours sont tout à fait semblables, c'est à l'intérieur que cela se passe différemment.
La tombée de la nuit met en valeur le rougeoiement naissant des pièces mises à cuire, phénomène qui est toujours un enchantement à observer:
Au fur et à mesure que la soirée avance, les coloris s'éclairent et se décalent vers l'orange...
Pour l'occasion, l'indispensable comparse de ces aventures, Eric "Pépin" Angehrn est aussi au feu, et ainsi nous pouvons nous relayer à l'alimentation des fours et ressortir de la fosse avant que nos mollets soient rôtis à point...
Vers 1 heure du matin, la cuisson arrive à son terme et une petite réduction qui assombrira les revêtement clôturera l'opération. La cuisson mérovingienne est déjà terminée depuis près de 3 heures. Les fours à coupole sont nettement plus lents, mais aussi nettement plus facile à régler en fonction des coloris que l'on souhaite obtenir. Il faut dire aussi qu'avec son 1,10 m. de diamètre intérieur et les 150 degrés de plus que nécessite cette cuisson, il est assez normal que sa durée en soit rallongée.
La cheminée a été obturée et les gaz issus de la combustion incomplète s'échappent par toutes les fissures possibles et se réenflamment au contact de l'air. C'est le monoxyde de carbone ainsi produit qui assombrira les revêtements argileux par transformation de l'oxyde de fer. Une réoxydation immédiate révélera les reflets métalliques et créera ce que l'on, dans le jargon archéologique, nomme "céramique métallescente", grande spécialité gallo-romaine des IIIème et IVème siècles.
Après, il faut attendre. Deux jours de refroidissement. La céramique est un métier de silence et de patience, mais l'attente consécutive aux grosses fournées met parfois les nerfs à rude épreuve...
Donc deux jours et quelques rognures d'ongles en moins plus tard, défournement!
Dès l'ouverture, c'est l'euphorie. Une première cruche extraite, encore très chaude, montre que la fournée est parfaitement réussie.
C'est une copie d'une variante peu courante de sigillée tardive que l'on nome "Sigillée tardive d'Ile-de-France" produite près de Meaux. Les rinceaux sont peints en sous-jacent, puis le récipient est entièrement recouvert de vernis argileux qui laissera légèrement apparaître le dessin par transparence. Un bon marqueur archéologique de la seconde moitié du IVBéme siècle...
Tout comme cette cruche argonnaise typique des années 360-390. Dans ce car, les rinceaux sont peints en blanc sur le vernis argileux fraîchement posé.
Et là, c'est un splendide mortier "gueule de lion" que l'on vient de sortir. Cette exécution particulière est une copie dans le style des pièces de Thonon ou de Portout-Conjux dans l'Ain vers la fin du IIIème ou le début du IVème s.
D'autres pièces étaient en essai, dont ces deux assiettes de "DTS-RBK", une céramique que je connaissais depuis longtemps mais dont je viens de dénicher quelques beaux clichés ainsi que la typo complète. DTS-RBK, c'est le doux, mais barbare patronyme de ces pièces: "dérivées tardives de sigillée / Rotbraun Gestrichene Keramik" ( l'écrire c'est une chose, mais essayez de le prononcer, pour voir...
). Au delà de l'anecdote, c'est LE marqueur typique du milieu du Vème siècle dans l'Est des Gaules, avec certains groupes de décors moletés dont nous reparlerons bientôt. Mal connue il y a peu de temps encore, c'est le chaînon manquant entre la déramique gallo-romaine tardive et les productions protomérovingiennes.
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la pièce de droite a pris un sévère coup de feu est s'est passablement déformée, mais la texture et les coloris de ces deux pièces correspondent parfaitement aux variantes connues qui vont du brun-rouge aux teintes violacées. A l'origine, elles étaient fabriquées à Mayen (D) où une production est attestée, mais probablement aussi à Trèves, où il s'en est dégagé une grosse quantité des les couches de destruction des thermes impériaux.
je reviendrai en détail sur certaines pièces de cette fournée ultérieurement.
Et pour finir une vue d'ensemble du "tableau de chasse":
Et encore toutes les pièces n'y sont pas...
Pour voir l'article complet ainsi que la cuisson mérovingienne:
http://arscretariae.romandie.com/Attention, la page est très lourde et le chargement est long....
Si votre ligne est quelque peu asthmatique, mieux vait prendre ce lien:
http://arscretariae.romandie.com/post/15150/202277